quartzfr_3_8.doc - Description
... l'autre ; et, après un examen de conscience très détaillé et très approfondi, ...
Cette tension acharnée de l'?il de mon âme vers un objet invisible m'a faussé la
vue. ...... Nous suivions une grande allée d'ormes d'une hauteur prodigieuse ; le
...... arrêtez-vous un peu et reprenez haleine, et puis continuez votre ascension ...
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Quartz Le jour touchant à sa fin, le soleil se mit à ramper sous l'abri de la
toiture de la terrasse et le darda de ses rayons. Kambas observait le jeu
de lumières né des deux petits verres posés sur la table. Il décida de se
resservir du thé, davantage par ennui que pour apaiser sa soif.
Son attente monotone reprit. Au loin, l'air vibrait au dessus du sol
surchauffé. Il n'était pas nécessaire de rester ainsi dehors songea-t-il,
mais un rapide coup d'?il aux étoffes suspendues au-dessus de lui confirma
l'arrivée prochaine d'une brise salvatrice. Kambas s'installa plus
confortablement, tira une pipe de sa poche et entreprit de la nettoyer.
Quand il releva enfin la tête, une silhouette était apparue sur la piste,
déformée par l'atmosphère brûlante. C'était elle à n'en pas douter. Elle avançait résolument dans sa direction
en menant sa monture par la bride. Il n'aurait pas su dire exactement ce
qu'il ressentit à cet instant. Embarrassé, il se gratta l'oreille quand
elle se présenta devant lui. La chasseresse défit l'écharpe qui lui
ceignait la tête et en secoua le sable qui s'y était incrusté, révélant un
visage au teint pâle et aux taches de rousseurs inhabituels pour son
espèce. « Pour être tout à fait franc, je ne comptais pas vraiment te revoir » fit-
il en levant les yeux pour la dévisager. Elle le dominait d'au moins une
tête et sa simple présence intimidait le vieux chef.
Pour toute réponse, elle désigna le verre encore vide et le plat de dattes
laissé à son intention sur le bord de table. « J'ai l'impression que tu
m'attendais tout de même. »
Il se gratta la barbe. « J'ai dit que je ne croyais pas à ton retour,
certes... Mais je ne suis pas impoli. Bien. Tu ne souhaites pas
t'assoir? »
« Attends, j'ai quelque chose pour toi », fit-elle en repartant vers sa
monture. Elle fouilla le paquetage fixé sur le dos de l'animal et en
extirpa quelque chose qu'elle traîna à même le sol, une créature bien trop
longue à son goût. Kambas ne put retenir une grimace de dégoût en découvrant la bête de plus
près. La chasseuse lui présenta un scolopendre aux dimensions colossales,
sa carapace couleur ocre parsemée de griffes chitineuses métallisées. Sans
doute par égard pour lui, elle le reposa rapidement hors de vue avant de
s'assoir. « Je l'ai trouvé dans les grottes que tu m'avais indiquées, les traces y
étaient encore fraîches. Quant aux deux jeunes disparus, hélas... » Elle
déposa doucement sur la table deux bijoux, de simples colliers d'ambres et
de fil de cuivre. Kambas s'en saisit d'une main tremblante. « Je leur porterai... la mauvaise nouvelle. C'était bien entendu ce que
nous craignions, mais... Merci, Seelys. » Elle s'était servi du thé et
mâchonnait une datte d'un air distrait. Il ne sut dire si elle était
affectée ou si c'était l'effet de la fatigue après ce qu'elle venait
d'accomplir.
« Est-ce que tu as ce que je t'avais demandé?" lui demanda-t-elle soudain
en le fixant de ses yeux verts pâles.
« J'ai préparé la nourriture et l'argent, oui" répondit Kambas. « J'ai pris
l'initiative d'y rajouter des munitions. C'est utile pour quelqu'un de
ta... »
« Ma profession? J'apprécie le geste, Kambas. »
« Souhaites-tu rester pour la nuit ? " Elle sourit d'un air énigmatique. « Je ne vais pas t'ennuyer plus longtemps, toi et les tiens. Non, ne me
redemande pas. Je compte bien profiter de la fraicheur de cette soirée pour
faire du chemin. »
« Tu ne manques pas d'énergie. » réagit-il avec un peu trop de soulagement.
« Je vais chercher tes affaires et t'offrir de quoi boire, tout même. »
« Ce ne sera pas de refus. » Alors qu'il se levait, elle l'interpella en
regardant la créature. « Kambas ? Dois-je vous la laisser ? » Il s'efforça de regarder une nouvelle foi la prise de Seelys. Il devait
bien s'avouer à contrec?ur qu'il y avait une certaine beauté chez ce
monstre. Une carapace aux excroissances finement ciselées et aux reflets
irisés tels ceux d'une gemme. Le mal dans toute sa splendeur et sa laideur.
Il s'éclaircit la gorge et détourna les yeux. « Non. Cette chose n'a pas sa place parmi nous. Et que vaut un trophée que
l'on a acheté ? Rien. Tu l'as tué et tu as vengé nos enfants, et je t'en
remercie encore. Garde le, ou plutôt brûle cette carcasse, ce n'est plus
notre affaire. »
« C'est sage." admit-elle avec le même sourire. « Cette créature n'avait
pas sa place ici, en effet. Je m'en chargerai à mon départ. »
« Où comptes-tu te rendre ? »
« Je vais remonter la voie vers Maskine. Il y a des personnes que je désire
rencontrer là-bas. »
« Tu y vas seule? Cette ville est déjà éloignée de nos terres. Comment
savoir quel accueil on y réserve à nous Tajiriki? La ville a peut-être même
été envahie par ces étrangers du Nord. Alors un nomade solitaire, qui plus
est une... » il s'abstint d'en dire plus. Cette Seelys venait de se rendre
dans un endroit maudit pour détruire une créature que personne n'avait
souhaité approcher.
« Une femme ? Une coureuse des dunes ? Je verrais bien, c'est un risque que
je suis prête à prendre. »
Évidemment, songea Kambas.
Anika vint l'enlacer tandis qu'il regardait par la fenêtre. Dans la
pénombre du soir, une faible lueur se détachait sur la colline qui
surplombait la piste.
« Est-ce son ?uvre ? » fit sa femme.
« Elle immole la bête, comme promis. »
« Tu aurais dû la retenir, Kambas. Nous lui devons bien ça. Elle
t'inquiète, n'est-ce pas ?"
« Oui. As-tu observé les marques sur ses vêtements? Je les ai déjà vu
auparavant. Ce sont celles de la tribu des Askariji. »
« Est-ce important ? »
« Cette tribu n'existe plus, ma chère Anika. » Ils gardèrent le silence un
moment, regardant le feu mourir lentement au loin.
« Peut-être. » tenta Anika. « Peut-être qu'elle se sent aussi peu à sa
place ici que cette créature. »
Seelys frotta les mandibules dans le sable pour les débarrasser de l'ichor
qui en suintait, puis les emballa soigneusement. Sans doute trouverait-elle
un amateur de ce genre de curiosités, ou peut-être un artisan qui en ferait
des dagues cérémonielles.
Elle tapota la tête écailleuse de son verrac, occupé à dépouiller un
buisson de son feuillage.
« Il est l'heure, mon grand. Nous devons partir avant qu'il ne fasse trop
froid pour toi. »
« Tu sais », continua-t-elle à l'intention de l'animal alors qu'elle lui
faisait descendre la colline. « Je crois que ce Kambas ne m'aimait pas
trop. »
L'?il reptilien du verrac resta sans réaction. « Tu as raison, l'important
c'est qu'il nous ait donné de quoi finir notre voyage. » « Ce monde est en train de changer. » constata Seelys, allongée sur une
couverture, le regard perdu dans le ciel nocturne. « Mais certaines choses
restent telles qu'elles sont. »
Chapitre I : Le Marteau Le bord de la felouque était si bas que Seelys pouvait aisément toucher
l'eau de la main. Une foule d'autres voyageurs se tassait sur
l'embarcation, ne lui laissant aucune place. Habituée à la chaleur du
désert, elle étouffait pourtant, forcée de portée un grande voile pour
dissimuler ses oreilles.
Heureusement, on ne lui prêtait guère attention. Assommés par la moiteur et
le manque d'activité, les passagers tentaient tant bien que mal de prendre
un peu de repos. Pourtant, quelques personnes gardaient l'?il sur la
rivière avec une inquiétude palpable. Ils remontaient le cours de l'Ander
en direction du Nord et des territoires occupés. Seelys n'avait observé
aucune activité remarquable le long des rives, ni même d'activité tout
court. En ces temps incertains, peu nombreux tentaient leur chance sur cet
axe d'ordinaire très fréquenté. Seelys entendit l'un des marins murmurer à l'oreille d'un autre en pointant
du doigt un point à l'aval de la rivière. Après quelques instants elle vit
de quoi il retournait, un navire remontait le cours d'eau, non pas
surmonté d'un mat, mais d'un panache de fumée blanc. Quand les autres
passagers comprirent de quoi il s'agissait, la foule fut prise d'un double
mouvement. Les uns s'approchèrent du bastingage pour mieux voir le navire
tandis que les autres se recroquevillèrent et tentèrent de dissimuler leur
visage. Le bateau faisait bien le triple de la longueur de leur embarcation et
remontait le fleuve à vitesse réduite. On distinguait des soldats accoudés
au bastingage dans leurs uniformes bleus et rouges. Même si certains
dévisageaient la felouque et ses passagers, la plupart semblaient
indifférents observa Seelys. Une passagère proche, une femme dans la
cinquantaine se pencha vers elle et lui parla à voix basse. « C'est une canonnière. Les Francs patrouillent au sud d'Hekara depuis un
moment. »
« Et c'est inquiétant. »
« J'ai entendu dire qu'ils observent les environs de Meskrine. » expliqua
la femme. « c'est peut-être mauvais signe, oui. »
« Le désert s'étend jusqu'à Hekara. Ils n'oseront pas pousser plus au
sud. »
« Ah. C'est ce qu'ils disaient sur la côte. On voit ce qu'il en est advenu,
n'est-ce pas ? » La dame poussa un gloussement. La canonnière était arrivée à leur hauteur. La clameur du moteur se mêlait
à celui des vagues en un fracas inhabituel aux oreilles d'un natif du Rift.
Seelys en profita pour détailler les Francs installés sur le pont. Le
climat ne leur réussissait guère à voir leurs mines fatiguées. Seul un
petit groupe veillait au grain, leurs fusils ostensiblement posés en
évidence dans leur direction. La chasseuse avait entendu parler de la conquête du Califat débutée une
décennie auparavant, mais elle se retrouvait pour la première fois
confrontée aux nord