Les mondes du froid - Geographica

Dans les hautes altitudes, le froid tient à la réduction de l'absorption du
rayonnement ... La décroissance de la température avec l'altitude s'exprime par
un gradient ... L'étroitesse du détroit de Béring limite la pénétration des eaux du
Pacifique ... des climats de haute latitude, car ils sont dus plutôt à la faible densité
de l'air ...

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Les mondes du froid Concours 2014 ENS et Chartes [pic]
Dossier documentaire initial Compilation Jean-Michel Dauriac 2013
Dossier à lire avec un atlas ouvert en permanence (Atlas du XXIème siècle -
Nathan , conseillé)
PÉRIGLACIAIRE (DOMAINE)
Article écrit par Roger COQUE, François DURAND-DASTÈS Le domaine périglaciaire fait partie des régions froides caractérisées par
un bilan radiatif fortement négatif. L'atmosphère y cède plus de chaleur
qu'elle n'en reçoit des diverses formes de rayonnement. Sous les hautes
latitudes, cette situation résulte de l'absence de rayonnement solaire
pendant la longue nuit polaire, tandis que la faible hauteur du Soleil
estival au-dessus de l'horizon limite leur apport thermique, en raison de
la forte épaisseur de la couche d'air à traverser et de leur étalement sur
de grandes surfaces. Dans les hautes altitudes, le froid tient à la
réduction de l'absorption du rayonnement solaire causée par la raréfaction
et l'assèchement de l'air. La décroissance de la température avec
l'altitude s'exprime par un gradient thermique de 0,6 à 0,7 0C par
100 mètres d'élévation jusqu'à la tropopause. Dans les deux cas, il faut
aussi mettre en cause les pertes d'énergie par réflexion sur la glace et la
neige, qui peuvent dépasser 95 % du rayonnement solaire.
Le froid constitue l'élément climatique dont les effets, directs ou
indirects, sont les plus décisifs sur la morphogenèse et les aspects du
relief de ce domaine. Il doit son qualificatif de « périglaciaire »,
proposé en 1909 par von ?ozi?ski, à sa localisation généralement en marge
des régions englacées des hautes latitudes et des montagnes élevées, c'est-
à-dire en deçà de la limite des neiges permanentes. À l'opposé, la lisière
septentrionale de la forêt boréale de conifères sépare approximativement
les premières du domaine tempéré des moyennes latitudes, alors que les
secondes sont bornées par la limite supérieure des forêts de l'étage
subalpin.
Dans ces limites, le domaine périglaciaire actuel englobe environ 18 % des
terres émergées. Outre les étages périglaciaires de montagne, il s'étend
essentiellement sur les grands archipels et les vastes masses continentales
des hautes latitudes de l'hémisphère Nord [pic]. Dans l'hémisphère Sud,
maritime, il ne concerne que les petites îles perdues au milieu des océans
et les rares portions déglacées de l'Antarctique. Mais le domaine périglaciaire a connu une extension plus considérable à la
faveur des glaciations quaternaires. On estime à plus de 10 millions de
kilomètres carrés ses gains réalisés alors aux dépens du domaine tempéré,
dont le modelé du relief apparaît fondamentalement hérité des périodes
froides les plus récentes (cf. domainetempéré). Les recherches effectuées
dans les régions périglaciaires actuelles aident ainsi à la compréhension
du façonnement du relief des pays tempérés. . Roger COQUE I - Les climats du domaine périglaciaire actuel Les régions de climat périglaciaire sont caractérisées par un hiver long et
accentué et par une période de dégel court et limité. La présence de cette
période de dégel permet de les séparer des régions de climat proprement
glaciaire, sans dégel significatif, tandis que le caractère peu marqué de
l'été les oppose aux régions « continentales » à hivers froids, mais à étés
plus nets (cf. milieux polaires). Climats périglaciaires des hautes latitudes
C'est évidemment la latitude qui est la première responsable des traits de
ces climats. L'hiver, le rayonnement solaire est très faible. La plupart
des régions périglaciaires sont situées au-delà des cercles polaires. Il y
a donc au moins quelques nuits de vingt-quatre heures, et de longues
semaines où les jours sont réduits à quelques heures. En été, au contraire,
les jours sont très longs, mais l'échauffement reste limité car le Soleil
ne monte pas haut sur l'horizon. Ses rayons sont donc obliques, et ils
traversent une grande épaisseur d'atmosphère avant d'atteindre le sol. Les
circulations atmosphérique et océanique interviennent surtout pour apporter
quelques nuances à l'intérieur du domaine périglaciaire. Les régions
côtières, surtout en Europe, sont quelque peu réchauffées par des masses
d'air en provenance des océans. De plus, des eaux atlantiques pénètrent
jusque dans la mer de Barents, et en réchauffent légèrement les côtes : à
près de 690 de latitude, le port de Mourmansk est libre de glaces.
L'étroitesse du détroit de Béring limite la pénétration des eaux du
Pacifique dans l'océan Arctique.
Le froid hivernal dure pendant l'essentiel de l'année. En général, les
températures moyennes sont négatives de septembre à mai inclus, et bien des
fleuves ne dégèlent qu'en juin. Les températures les plus basses sont
observées assez tard, en février sur le continent américain, en mars en
Eurasie. Les moyennes des mois les plus froids se situent entre - 20 et -
30 0C, et on a observé des minimums absolus de - 50 0C. (On notera que les
températures les plus froides sont observées, dans l'hémisphère Nord, dans
des stations qui n'appartiennent pas au domaine périglaciaire, car elles
ont un été assez chaud. Trop au sud pour avoir un été peu marqué, elles
doivent leur hiver hyperrigoureux à leur position continentale.)
L'hiver est aussi une saison sèche : la neige est peu épaisse ; légère,
elle est facilement soulevée par le vent. Sur les côtes de l'Alaska et dans
la Norvège septentrionale, les températures sont un peu moins basses
(moyenne autour de - 15 0C) et les précipitations plus fortes à cause de la
proximité de l'océan. Il existe donc sur les côtes un climat périglaciaire
atténué et humide, qui constitue un domaine original.
Après un printemps court et tardif, où l'augmentation de la longueur des
jours précède nettement le réchauffement, l'été est bref. Les températures
restent modérées. Certes, les moyennes se situent entre 0 et 10 0C, mais il
n'y a guère de période sans gel (à Alert, île d'Ellesmere, 820 de latitude
nord, en juillet 1963, il a gelé 18 nuits sur 31). Les précipitations sont
moins modestes qu'en hiver, et on observe beaucoup de journées maussades et
fraîches. Les temps clairs, assez rares, provoquent des montées sensibles
de la température : on a observé plus de 30 0C jusqu'à 70-750 de latitude
nord.
L'automne est précoce, et c'est la saison la plus perturbée par des
tempêtes parfois violentes. Climats périglaciaires de montagne
Les climats périglaciaires de montagne diffèrent sensiblement des climats
de haute latitude, car ils sont dus plutôt à la faible densité de l'air
qu'à la faiblesse du rayonnement solaire. L'air reste donc très froid, mais
le rayonnement solaire est fort. Aussi, l'été surtout, quand le manteau
neigeux a fondu, le sol peut s'échauffer et atteindre dans la journée des
températures assez importantes. Ce fait a évidemment des conséquences
notables sur la morphogenèse et la végétation.
Par ailleurs, il y a des différences considérables selon la latitude. Dans
les régions tropicales et équatoriales, le domaine périglaciaire apparaît à
de hautes altitudes. Il n'y a pas de rythme saisonnier. Celui-ci reparaît
aux latitudes tempérées : aux rythmes diurnes viennent ici s'ajouter des
oppositions très marquées entre l'hiver et l'été.
On peut donc distinguer en définitive quatre types de climats
périglaciaires : climats de haute latitude de nuance continentale ; climats
de haute latitude atténués par la position littorale ; climats des hautes
montagnes tropicales ; climats des hautes montagnes tempérées. . François DURAND-DASTÈS II - Les systèmes morphogéniques Les systèmes morphogéniques périglaciaires résultent de combinaisons
réalisées entre des actions météoriques, des processus morphogéniques et de
grands agents d'évacuation des matériaux. Leurs activités sont
essentiellement réglées par l'intensité, la durée et la fréquence du gel. Actions météoriques
La primauté du gel s'exprime par une nette prépondérance des actions
mécaniques sur les processus chimiques et biochimiques. Son intervention
sur les roches provoque une contraction des minéraux, qui paraît toutefois
incapable d'entraîner une fragmentation. En revanche, le gel à l'état
humide constitue un puissant agent de débitage. Cette gélifraction, ou
cryoclastie, tient à l'augmentation de volume d'environ 9 % qui accompagne
la transformation de l'eau libre des roches en glace, et crée des tensions
internes engendrant des ruptures.
Selon l'importance et l'agencement de leurs vides, les roches sont plus ou
moins gélives. Très poreuse, la craie est très sensible au gel et se
fragmente en granules ; les roches à structure schisteuse se débitent aussi
aisément en paillettes. À cette microgélifraction s'oppose la
macrogélifraction des roches compactes, caractérisée par le délogement de
gros blocs, dû à l'exploitation par le gel des réseaux de fissures
constitués par les diaclases, les plans de clivage ou les joints de
stratification.
Mais ces types de fragmentation dépendent aussi des modalités du gel. Le
premier correspond au gel modéré et superficiel des climats périglaciaires
maritimes (îles australes, Islande et Groenland du Sud-Ouest) et de ceux
des hautes montagnes tropicales à alternances gel-dégel journalières. Les
variétés continentales à gel intense et prolongé, caractérisées par
quelques alternances gel-dégel saisonnières, engendrent le second.
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