PLAN - Faculté de Droit de Nantes
Ce concept d'irresponsabilité découle d'un fondement morale du droit pénal
selon .... L'examen du dossier pénal peut se révéler intéressant pour l'expert en
ce ...
Part of the document
LA PERSONNE ATTEINTE D'UN TROUBLE PSYCHIQUE
I) Le constat d'une pénalisation contemporaine de la maladie mentale au
travers de la procédure de traitement du malade mental délinquant A- L'expertise psychiatrique en crise 1- La pratique de l'expertise psychiatrique déterminante à
l'établissement de l'irresponsabilité pénale
2- Des expertises psychiatriques concluant de plus en plus à la
responsabilité du malade mental
B- Les difficultés afférentes à l'hospitalisation d'office et le malaise
des prisons asiles 1- l'hospitalisation d'office face à la désinstitutionalisation de
l'hôpital psychiatrique 2- La recrudescence du nombre de malade mentaux en prison
II) Les solutions proposées pour la mise en ?uvre effective des principes
d'irresponsabilité et de responsabilité atténuée, un débat toujours
inachevé A- Une refonte de la procédure souhaitée 1- la volonté d'améliorer les conditions d'expertise
2- le souci d'une meilleure réglementation de l'hospitalisation d'office 3- la préoccupation d'une réelle intégration de la responsabilité
atténuée limitant la durée des incarcérations
B- Vers une judiciarisation de la maladie mentale 1- la mise en place d'une juridiction ad hoc palliant l'absence de procès
du malade mental
2- l'opportunité d'instaurer une juridiction ad hoc
a) l'opportunité au regard de la victime de l'infraction
b) l'opportunité au regard de l'auteur de l'infraction LA PERSONNE ATTEINTE D'UN TROUBLE PSYCHIQUE
INTRODUCTION
Selon Gérard Cornu, la responsabilité pénale est l'obligation de répondre
des infractions commises et de subir les peines prévues par le texte qui
les répriment. La responsabilité pénale suppose donc de l'auteur un acte
intentionnel c'est- à -dire commis en conscience et volonté, celui-ci
devant être capable de comprendre et vouloir son acte. C'est seulement à
cette condition que pourra lui être imputée l'infraction. Si tel n'est pas
le cas, la justice décidera que l'auteur n'est pas punissable c'est-à-dire
irresponsable. Ne pourra alors lui être imputée aucune infraction.
Ce concept d'irresponsabilité découle d'un fondement morale du droit pénal
selon lequel ce n'est que sous couvert de discernement et de libre arbitre
que des poursuites sont possibles.
Notre droit pénal connaît trois causes d'irresponsabilités, appelées aussi
causes subjectives d'irresponsabilité : le trouble psychique ou
neuropsychique qui nous intéresse aujourd'hui, la contrainte et l'erreur.
Le trouble psychique se définit comme une altération des facultés mentales
qui atteint l'intelligence ou la volonté d'un individu.
Traditionnellement, notre droit considère l'individu atteint d'un trouble
mental comme irresponsable. En effet, privé de discernement et de libre
arbitre au moment de l'acte, il apparaîtrait alors injuste et inutile qu'il
assume au plan pénal les conséquences de ses actes. Injuste car il n'a pas
eu conscience qu'il commettait une infraction, et inutile car incapable de
comprendre le caractère dissuasif de la sanction.
Le principe d'irresponsabilité pénale n'est pas à proprement parlé inscrit
dans le code pénal. Il découle de l'évidence des articles 122-1 et 122-2 de
ce même code. D'ailleurs, les malades mentaux n'ont pas toujours été considérés de la
même manière par le droit criminel. Ainsi, en droit romain, le fou reste
impuni car il n'a pas eu d'intention et est suffisamment sanctionné par sa
maladie. Au contraire, le Moyen Age considérait les fous comme possédés par
le démon et donc soumis aux peines de droit commun. Le principe
d'irresponsabilité fut ensuite repris par le droit canonique puis par le
droit laïc au 18ème siècle grâce à différents travaux comme ceux de Pinel
et d'Esquirol qui introduisirent une nouvelle conception de la folie. Elle
devint une maladie mentale dite « aliénante » de l'esprit qui prive ceux
qui en sont atteint de leur libre arbitre et donc de leur responsabilité
pénale.
Le code pénal de 1810 a suivi cette nouvelle conception faisant échapper le
dément à toute répression par son article 64 selon lequel : « il n'y a ni
crime, ni délit lorsque le prévenu était en état de démence au temps de
l'action. » Cependant, la formulation de l'article 64 s'est révélée très
rapidement inadaptée. En effet, grâce aux progrès de la psychiatrie, le
terme démence s'est vu donné un sens médical précis ne permettant plus de
recouvrir toutes les formes d'aliénation mentale. D'autre part, la
formulation « ni crime, ni délit » n'englobait pas les contraventions et
laissait croire qu'aucune infraction n'avait été commise provoquant des
difficultés pour retenir la culpabilité d'éventuels complices de l'aliéné.
Enfin, l'article 64 ne prenait pas en compte le cas des personnes atteintes
de troubles mentaux insuffisamment graves pour être qualifiés d'état de
démence mais de nature à influencer le comportement et donc à altérer le
libre arbitre. Ces personnes étaient alors déclarées responsable mais
bénéficiaient parfois de circonstances atténuantes. Cette pratique des
magistrats était issue de la circulaire Chaumier de 1905 qui invitait les
juges à adapter la notion de démence aux progrès de la psychiatrie, en
prenant en compte des troubles mentaux qui restaient en dehors de son
domaine d'application lors de la détermination de la peine. Toutefois, ce
système était fortement critiqué en raison de son caractère artificiel et
arbitraire. Les rédacteurs du nouveau code pénal ont donc modifié l'article 64 devenu
l'article 122-1. La notion de démence est alors abandonnée au profit de
celle de « trouble psychique ou neuropsychique » plus large. De même,
toutes les infractions sont visées et est prévu expressément la situation
intermédiaire d'un trouble mental ayant seulement altéré et non aboli le
discernement.
L'article 122-1 du code pénal suppose trois conditions pour retenir
l'irresponsabilité pénale: un trouble mental, ayant aboli ou altéré le
discernement, et enfin, un trouble mental existant au moment des faits. Un trouble mental d'abord, il est vu au sens large par le législateur
consacrant ainsi l'interprétation extensive que la jurisprudence en
faisait. Il vise donc tous les troubles mentaux quelque soit leur origine
ou leur nature. Il peut s'agir de lésions congénitales, psychiques ou
accidentels entraînant des formes d'arriération mentale, la détérioration
de capacités mentales ou des troubles du comportement. Ce peut être aussi
des maladies mentales n'impliquant pas de lésions telles la schizophrénie,
paranoïa et autres psychoses maniaco dépressive. Enfin, il peut s'agir de
troubles non pathologiques comme le somnambulisme, un état alcoolique ou un
comportement dû à la prise de stupéfiants. Un trouble mental ayant aboli ou altéré le discernement ensuite.
Pour conclure à l'irresponsabilité totale selon l'alinéa 1, le trouble doit
avoir aboli le discernement ou le contrôle des actes. Selon messieurs
Desportes et Le Gunehec cela signifie la nécessité de perdre soit la
capacité de vouloir, c'est-à-dire la capacité des contrôler ses actes, soit
la capacité de comprendre, c'est-à-dire la capacité d'interpréter ses actes
dans la réalité. Seul l'absence d'un de ces deux éléments suffit à engager
l'irresponsabilité. Le trouble mental peut avoir aussi simplement altéré le discernement ou
entravé le contrôle des actes. C'est alors l'alinéa 2 de l'article 122-1 du
code pénal qui sera mis en ?uvre, la présence du trouble pourra alors être
pris en compte dans le quantum de la peine. Il s'agit de la situation
intermédiaire dans laquelle le trouble mental n'a pas complètement privé
l'individu de discernement pour permettre l'irresponsabilité. Mais c'est
aussi la situation la plus difficile à qualifier pour l'expert notamment
car, comment déterminer avec certitude la frontière entre le délinquant
normal et celui dont le discernement est simplement altéré notamment dans
le cas des intoxications volontaires telles l'alcool ou la drogue.
L'absorption de ces produits ne provoque pas une perte totale de contrôle
mais entraîne une diminution des inhibitions sociales et peuvent donc être
considérés comme altérant le discernement. Si l'article 122-1 alinéa 2
interprété à la lettre n'écarte pas la prise en compte de ces
comportements, l'intention du législateur est différente car il incrimine
directement la conduite sous l'empire d'un état alcoolique ou encore la
prise de stupéfiants. Ce qui montre sa volonté de ne pas faire bénéficier
ces comportements d'une atténuation de la répression par l'article 122-1 et
la jurisprudence l'a bien compris puisqu'elle ne considère pas l'ivresse
comme entrant dans le cadre des troubles mentaux. Enfin, le trouble mental doit avoir existé au moment des faits. Ce qui veut
dire aussi qu'il doit avoir une relation causale avec l'infraction, c'est à
cause de lui que l'infraction a été perpétrée.
A noter que si le trouble mental est postérieur aux faits alors que la
procédure est en cours, celle-ci est suspendue car l'individu se trouve
alors dans l'impossibilité de se défendre. L'instruction peut toutefois se
poursuivre sauf s'il s'agit d'interroger le mis en cause. Si la personne
retrouve sa lucidité, la procédure peut alors reprendre.
La preuve de l'irresponsabilité pénale ou de l'atténuation de
responsabilité se fera au moyen de l'expertise psychiatrique.
L'irresponsabilité pour trouble mental pourra être constatée à tous les
stades de la procé