VERNE - ''Voyage au centre de la Terre' - Comptoir Littéraire

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www.comptoirlitteraire.com André Durand présente ''Voyage au centre de la Terre''
(1864) roman de Jules VERNE
pour lequel on trouve un résumé
puis successivement l'examen de :
l'intérêt de l'action (page 3)
l'intérêt littéraire (page 4)
l'intérêt documentaire (page 5)
l'intérêt psychologique (page 9)
l'intérêt philosophique (page 10)
la destinée de l'?uvre (page 10) Bonne lecture ! À Hambourg, au numéro 19 de la Königstrasse, habite le professeur Otto
Lidenbrock, géologue et minéralogiste, qui enseigne au Johannaeum. Amateur
de vieux livres, il a acheté le manuscrit original d'une saga islandaise,
''Heimskringla'', écrite par Snorri Sturluson au XIIe siècle. «Le 24 mai
1863, un dimanche», son neveu, Axel, qui l'aide dans ses travaux et aime en
secret sa pupille, la douce Graüben, y découvre un parchemin codé, rédigé
en caractères runiques par un alchimiste islandais du XVIe siècle. L'oncle
et son neveu se passionnent pour ce cryptogramme, qu'ils finissent par
déchiffrer : «Descends dans le cratère du Yocul de Sneffels que l'ombre du
Scartaris vient caresser avant les calendes de juillet, voyageur audacieux,
et tu parviendras au centre de la Terre. Ce que j'ai fait. Arne
Saknussemm.» (chapitres I à IV).
Aussitôt, le professeur, qui est enthousiaste et impulsif, décide de partir
dès le lendemain pour l'Islande, en emmenant avec lui son neveu, qui est
beaucoup plus réticent : «Il n'y avait plus à en douter. Mon oncle venait
d'employer son après-midi à se procurer une partie des objets nécessaires à
son voyage...» Il met sur pied une expédition, personne ne doutant qu'elle
sera couronnée par un succès : «Ce sera là un beau voyage», dit Graüben à
Axel. (chapitres V à VIII).
Le 2 juin, ils arrivent à Copenhague, et, le 4, partent pour Reykjavik où
ils sont le 16. Ils traversent l'Islande jusqu'au Sneffels, voyant de
nombreux épanchements volcaniques, une rivière d'eau chaude sortant sur un
glacier. Mais ils traversent aussi les marécages de Gardar. Ils passent la
nuit dans la maison d'un paysan. Ils rencontrent un lépreux, ce qui
accentue I'attente angoissée d'Axel. (chapitres IX à XVI).
Ils prennent pour guide un chasseur d'eiders nommé Hans Bjelke, qui est
aussi flegmatique que son nouveau maître est bouillant. Les trois hommes se
rendent au pied du volcan Sneffels, et en font l'ascension, parvenant au
sommet le 28 juin : «Le véritable voyage commençait» (chapitre XVII).
Ils descendent dans le cratère éteint où se présentent trois cheminées. Ils
observent des laves issues de l'éruption de 1229. Le soleil apparaît pour
la dernière fois, et permet de trouver le bon chemin car, selon les
instructions du cryptogramme, la cheminée où se trouve le passage vers le
centre de la Terre est effleurée par l'ombre portée d'un haut pic, le
Scartaris, qui agit à la manière d'un cadran solaire, «avant les calendes
de juillet», c'est-à-dire dans les derniers jours de juin. Le 1er juillet,
ils s'engouffrent dans les entrailles du globe (chapitre XVIII).
Le voyage leur fait connaître d'émouvantes péripéties. Entre deux galeries
qu'ils éclairent vaguement de leurs torches, ils font d'abord un mauvais
choix et doivent revenir au point de jonction. À sept lieues (une lieue =
quatre kilomètres) sous terre, à cinquante lieues du Sneffels, ils
découvrent une vaste caverne. Ils souffrent de la soif. Le 9 juillet, à
trente lieues sous terre, à environ deux cents lieues de l'Islande, alors
qu'il ouvrait la marche, Axel se perd, se retrouve seul dans une grotte,
ses tentatives pour revenir sur ses pas, pour retrouver son oncle et Hans
s'avérant infructueuses. Dans sa précipitation, il fait une chute qui
endommage sa lampe. L'obscurité totale vient alors s'ajouter à la solitude
et à la peur de mourir de soif. Mais il débouche soudain, à sept lieues
sous terre, sur une mer souterraine éclairée, et retrouve les autres.
(chapitres XIX à XXVI).
Cette mer souterraine, qu'Axel appelle «Méditerranée» car elle est bien, en
effet, au milieu des terres, mais qui reçoit le nom de «mer Lidenbrock»,
est éclairée par un phénomène électrique inconnu. Ils s'y engagent sur un
radeau. Ils voient que, sur les rivages, prospèrent des herbes géantes des
époques secondaires que paissent des monstres, mammouths, dinosaures, etc..
Progressant rapidement, ils sont, le 13 juillet, à cinquante lieues du
Sneffels, «sous la pleine mer», le 15 juillet, à trois cent cinquante
lieues : «Ainsi, dis-je en considérant la carte, la partie montagneuse de
l'Écosse est au-dessus de nous, et, là, les monts Grampians élèvent à une
prodigieuse hauteur leur cime couverte de neige.» (chapitres XXVII à
XXXII).
Le jeudi 20 juillet, à deux cent soixante-dix lieues de la côte, soit
environ à six cents lieues de l'Islande, sous la ville de Hambourg où
Graüben attend son futur mari, ils atteignent un îlot qui est appelé «îlot
Axel». Ils y assistent à la lutte mortelle entre deux animaux de l'ère
secondaire, un ichtyosaure et un plésiosaure. Ils y entrevoient le profil
d'un homme fossile de l'époque quaternaire, et le professeur fait une docte
conférence devant un Johanneum imaginaire. Ils font face à une tempête et à
un naufrage (chapitres XXXIII à XXXVI).
Ils découvrent un ossuaire gigantesque, et leur apparaissent les restes
d'un «berger antédiluvien». Mais, dans les taillis d'une forêt, ils voient
un troupeau de mastodontes dont le pâtre géant est un singe ou un être
humain ! (chapitres XXXVII à XXXIX).
Ils trouvent un poignard rouillé, des initiales gravées dans la roche qui
montrent encore le chemin suivi par Saknüssemm. Mais il a été barré par un
séisme ; ils minent I'obstacle, et I'explosion, attendue au large sur le
radeau («Nous allons devenir le jouet des phénomènes de Ia terre.»),
déclenche un cataclysme. Ils font une effroyable chute dans des abîmes
tourbillonnants et mugissants, après laquelle l'eau élève le radeau dans un
tunnel vertical, puis disparaît évaporée par la chaleur des matières
éruptives qui la poussent : c'est au milieu des terrifiants phénomèmes
d'une éruption que les explorateurs sont, le 29 juillet, expulsés par le
cratère en pleine activité du Stromboli. Axel s'écrie : «Ah ! quel voyage !
quel merveilleux voyage ! Entrés par un volcan, nous étions sortis par un
autre, et cet autre était situé à plus de douze cents lieues du Sneffels,
de cet aride pays de l'Islande jeté aux confins du monde ! Les hasards de
cette expédition nous avaient transportés au sein des plus harmonieuses
contrées de la Terre. Nous avions abandonné la région des neiges éternelles
pour celles de la verdure infinie, et laissé au-dessus de nos têtes le
brouillard grisâtre des zones glacées pour revenir au ciel azuré de la
Sicile !» (chapitres XL à XLIII).
Ils descendent en passant par des vignes gardées par un enfant gardien,
sont reçus par des pêcheurs, partent pour Messine, puis pour Marseille et
enfin Hambourg où ils arrivent le 9 août ! Pour le professeur Lidenbrock,
c'est la consécration : «Mon oncle fut le plus heureux des savants [...],
membre correspondant de toutes les sociétés scientifiques, géographiques et
minéralogiques des cinq parties du monde.» (chapitre XLV). Analyse
(la pagination est celle de l'édition du Livre de poche) Intérêt de l'action Toute la structure de ce roman d'aventures s'apparente à celle du conte.
Nous retrouvons, en effet, la plupart des séquences fondamentales :
équilibre initial, fracture, départ et quête du héros, rencontre de
I'auxiliaire magique (Hans), épreuves, combat, victoire et retour du héros
qui accède à un nouveau statut. Et cette fiction met en scène, un peu comme
le conte, des désirs et des craintes enracinés dans la psyché.
Le roman est un bon exemple de la conciliation que tenta toujours Jules
Verne entre volonté de réalisme et puissance extravagante de l'imagination.
Son argument : explorer le centre de la Terre sur la foi d'un message codé,
découvert par hasard, dont I'auteur serait un alchimiste du XVIe siècle,
est en soi pure chimère.
Cependant, le voyage sous la Terre est précédé par un premier voyage qui
consiste à se rendre en Islande, et plus exactement vers le cratère du
Sneffels, point de départ prévu par le document d'Arne Saknussemm, et qui
occupe 145 pages.
Le voyage dans les entrailles de la Terre, qui est l'essentiel du roman,
est habillement dramatisé, ponctué d'aventures trépidantes, Jules Verne
ayant le chic pour placer ses personnages dans des situations extrêmes, des
ruptures de rythme étant ménagées pour soutenir la fascination du lecteur.
À partir de la découverte de la mer, le récit prend une orientation plus
fantastique, puisqu'elle est éclairée par un phénomène électrique inconnu,
qu'elle est surplombée d'un «ciel intérieur» («La voûte suspendue au-dessus
de ma tête, le ciel, si I'on veut, semblait faite de grands nuages, vapeurs
mobiles et changeantes, qui, par l'effet de la condensation, devaient, à de
certains jours, se résoudre en pluies torrentielles.» «Je me souvins alors
de cette théorie d'un capitaine anglais qui assimilait la Terre à une vaste
sphère creuse, à I'intérieur de laquelle I'air se maintenait lumineux par
suite