1 Les divergences curriculum - évaluation certificative dans les ...

Nous décrivons ici les épreuves des trois matières d'examen en français ....
Noyau & Koudossou 2004, Noyau 2006), et le français devenant une cause
majeure ...

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Les divergences curriculum - évaluation certificative
dans les écoles primaires bilingues de pays du sud :
conséquences du point de vue de l'acquisition du bilinguisme Colette NOYAU
UMR 7114 MoDyCo CNRS
Université Paris Ouest Nanterre La Défense
colette.noyau.free.fr
http://colette.noyau.free.fr Paru dans : 'Curriculum, programmes et autres itinéraires en langues et
cultures (FLS-FLE)',
Le Français dans le Monde - Recherches et applications, n° 49 (janvier),
pp. 137-154.
Repris dans : The Canadian Modern Language Review / La Revue Canadienne des
Langues Vivantes,
vol. 67/3, August /Août 2011, pp. 301-322.
Cet article est centré sur un aspect complémentaire de la question du
curriculum : l'évaluation certificative, mais cette centration nous permet
de saisir les liens qui les unissent, et les problèmes qui découlent des
contradictions ou manques de cohérence entre ces deux aspects des systèmes
éducatifs. On constate fréquemment que les dispositifs d'évaluation certificative ne
reflètent que très partiellement les objectifs déclarés dans le curriculum
en vigueur, ou même qu'ils entrent en contradiction avec ces objectifs et
avec les pratiques souhaitées qui en découlent pour la classe. Les
enseignants eux-mêmes se sentent souvent bridés dans leurs choix
pédagogiques par ces examens auxquels ils préparent leurs élèves, et qui
les évaluent eux-mêmes. Mais on ne trouve pas, à notre connaissance,
d'études abordant de façon frontale les conséquences éducatives de ces
divergences. C'est ce que nous tentons de faire ici à partir d'une étude
récente que nous avons menée sur les écoles bilingues de trois pays de la
francophonie du sud, représentant chacun l'une des trois aires :
arabophone, créolophone, subsaharienne. Le bilinguisme scolaire se définit
comme une option pédagogique dans laquelle plus d'une langue sert de langue
d'enseignement. Le curriculum (bilingue dans ce cas) définit alors les
domaines enseignés en langue a (La) et ceux enseignés en langue b (Lb),
ainsi que les temps d'utilisation de La et Lb, selon les années[1]. Reste à
déterminer le sort de La et Lb dans les dispositifs d'évaluation
certificative, ce qui fait l'objet du présent travail. 1. CURRICULA ET ÉVALUATION CERTIFICATIVE AU PRIMAIRE Dans le prolongement d'une étude sur les pratiques d'enseignement et plus
précisément les modalités du passage de L1 à L2 dans les écoles bilingues
primaires au Mali, en Mauritanie et aux Seychelles (Noyau, 2009), nous
allons détailler les conséquences des divergences entre les curricula en
vigueur et les systèmes et pratiques d'évaluation certificative, du point
de vue de l'acquisition de la L2 et de la bilingualité en devenir chez les
élèves. Les enfants issus des classes bilingues se retrouvent face à une
évaluation sélective de fin de cycle primaire, filtre pour l'accès au
collège, qui reste souvent proche de celle de l'école monolingue classique
de type colonial, peu appropriée pour évaluer les apprentissages supposés
par le curriculum. Dans chacun des pays, nous avons travaillé avec un échantillon de 20 copies
notées pour chaque épreuve (archives des services des examens en
Mauritanie, examens blancs au Mali, évaluation nationale en cours de
dernière année aux Seychelles), fournies par les ministères respectifs.
Nous les analysons à partir des questions suivantes : quelles tâches
cognitives suscitent les épreuves d'examen chez les élèves ? sont-elles
en cohérence avec les objectifs d'apprentissage du cycle évalué ? tiennent-
elles compte du bilinguisme scolaire visé ? les pratiques d'évaluation par
les correcteurs correspondent-elles aux normes d'évaluation visées ? quel
pilotage de l'enseignement constituent ces examens ? comment faire évoluer
ces dispositifs d'évaluation certificative au bénéfice des apprentissages ?
Ces trois pays ont engagé un mouvement de réforme de l'éducation de base,
qui définit les rôles respectifs des langues dans le curriculum (en volume
et en répartition des domaines d'enseignement pour chaque langue), et ils
s'inspirent dans la conception de leur curriculum de l'approche par
compétences (désormais APC). Dans cette approche, les objectifs
d'apprentissage sont définis, non pas en termes de disciplines, mais de
domaines intégrateurs pluridisciplinaires, les activités d'apprentissage
relèvent, non pas de la mémorisation de connaissances, mais de situations-
problèmes à résoudre par la mobilisation de savoirs pluriels, et les
évaluations sont conçues, non pas en termes de restitution et application
de connaissances quantifiables par des scores, mais d'intégration et de
transfert de connaissances en vue de leur mobilisation dans des situations
complexes (cf. Scallon, 2004 ; Delorme, 2008). L'évaluation ne peut alors
être purement quantitative, mais exige le jugement des évaluateurs sur la
qualité des connaissances évoquées et la pertinence des stratégies mises en
?uvre pour résoudre le problème. Il est alors essentiel, pour la fiabilité
des évaluations, d'expliciter la nature des critères sur lesquels repose le
jugement, et de stipuler des échelles de réussite selon ces critères, bases
de la notation. Les trois pays offrent des situations de scolarisation primaire bien
différentes, et pratiquent des conceptions très divergentes du bilinguisme
scolaire (synthèse dans le Tableau 1 en annexe). Les 3 systèmes étudiés
s'opposent aux filières monolingues dites 'classiques' à français exclusif,
étudiées antérieurement sur l'exemple du Togo (Noyau, 2004a, 2005, 2006),
classes qui au Mali coexistent avec celles de la filière bilingue dans
l'enseignement public, et que l'on trouve dans les trois pays dans des
écoles privées. Par ailleurs, la situation est assez spécifique aux
Seychelles, pays tourné vers des certifications anglophones à validation
internationale, et où le français, présent dès le préscolaire, reste langue
enseignée sans devenir médium d'enseignement comme le créole et l'anglais,
malgré son statut de langue officielle entre l'anglais et le créole
seychellois 2. LE CAS DE LA MAURITANIE Nous avons examiné les modalités de notation de lots d'épreuves du CEF de
juin 2007 (le Certificat d'Éducation Fondamentale, examen national de fin
de 6e année valant concours d'entrée au secondaire). Nous décrivons ici les
épreuves des trois matières d'examen en français : Français (coefficient
3), Mathématiques (coefficient 5) et Sciences (coefficient 2), et la façon
dont elles ont été traitées par les élèves et les correcteurs. Epreuve : français Durée : 1 heure
Situation d'évaluation :
Chaque année, les Musulmans du monde entier célèbrent la fête de Tabaski
(Id El Adha). Très tôt le matin, les hommes, les femmes et les enfants se
préparent pour aller à la grande place où sera organisée la prière de El
Id ; ils se lavent et portent leurs habits neufs.
Juste après la prière, les familles égorgent des moutons et préparent de
très bons repas. L'après-midi des visites sont organisées pour souhaiter
aux voisins, aux parents et aux amis une très bonne et heureuse fête.
Consigne :
Ecris en une dizaine de lignes ce que tu as fait le jour de la dernière
fête de Tabaski en parlant :
- des habits que tu as portés
- des repas que tu as mangés
- des lieux que tu as visités
- des amis que tu as rencontrés. Il s'agit de s'inspirer d'un texte constituant une situation de départ, et
fournissant contexte situationnel et matériaux linguistiques pour
l'expression, pour parler d'expériences personnelles. Cette épreuve teste
le degré d'atteinte de l'Objectif Terminal d'Intégration (désormais OTI) du
programme de Français de la 6AF : « A partir d'un message oral (...) ou
d'un message écrit (...) des informations et des avis,
sollicitant en retour de la part de l'interlocuteur des informations ou des
avis, l'élève sera capable de produire une réponse orale et/ou écrite
cohérente avec le message reçu et adéquate au contexte de communication. »
Le programme spécifie aussi les critères d'évaluation, répartis en 3
critères de base et 2 critères de perfectionnement, à appliquer pour
évaluer les productions des élèves, la grille de correction soumise aux
correcteurs des examens s'en inspirant de très près. Voici les critères et indicateurs de cette épreuve : | |Critères |Poin|Indicateurs |
| | |ts | |
|Critères de |1/ Adéquation de la |5 |- L'élève produit un texte qui |
|base |production à la | |parle d'une fête |
| |situation (la | |- L'élève produit un texte |
| |production de | |comprenant des passages |
| |l'élève respecte la | |descriptifs |
| |consigne) | |- L'élève produit un texte dont|
| | | |le volume est conforme à la |
| | | |consigne |
| |2/ Cohérence |5 |- Enchaînemenet logique des |
| |sémantique de la | |idées exprimées : se laver, |
| |production (la |