Environnements Informatisés d'Apprentissage - Université de Genève

... vite oublié ou durable, utile « juste pour passer l'examen » ou tout au long de
sa vie, ... selon des algorithmes appelés « Réseaux de Neurones Artificiels ».

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Environnements Informatisés d'Apprentissage Notes de cours MALTT, volée Nestor, 2007-2008 NicolasSSzilas
TECFA
Université de Genève Septembre 2007 Ces notes de cours présentent une vision synthétique des concepts
fondamentaux abordés pendant le cours EIA.
Première partie : les grands principes pédagogiques
Si apprendre était chose aisée, la tâche de conception d'environnements
informatisés d'apprentissage (EIA) le serait également... Mais
l'apprentissage est un phénomène à la fois complexe et multi-forme. Cela ne
veut presque rien dire d'affirmer « il a appris ceci », tant un
apprentissage donné peut être superficiel ou profond, vite oublié ou
durable, utile « juste pour passer l'examen » ou tout au long de sa vie,
applicable dans le contexte précis de l'acquisition ou au contraire
transférable à une grande variété de situations. Pour comprendre cette diversité, le concept de représentation, propre aux
Sciences Cognitives, s'avère utile. Les représentations, sont des
« structures stables modèles d'une réalité externe ». Apprendre, c'est
finalement construire des représentations efficaces nous permettant d'être
de plus en plus compétent. Ces représentations sont elles-mêmes de nature
très diverse, et un simple apprentissage mobilise de nombreuses
représentations. Prenons l'exemple du théorème de Pythagore. Il est à la
fois une petit comptine (« le carré de l'hypoténuse est égal à la somme des
carrés des deux autres côtés »), une image mentale (un triangle
équilatéral), une formule mathématique (a2 + b2 = c2), un mode opératoire
pour trouver la mesure d'un côté en fonction des deux autres, une
introduction aux nombres non rationnels, une place spécifique dans
l'histoire des mathématiques, etc. Ce « complexe » de représentations ne
s'acquiert bien évidemment pas en quelques minutes et qui plus est ce n'est
pas l'accumulation de ces représentations qui compte mais leur
articulation, l'organisation qu'elles constituent. De quels outils disposons-nous pour construire ces représentations ? Point
de scies et marteaux, encore moins de scalpels ou électrodes à notre
disposition ! Il nous faut « opérer de l'extérieur ». Par ses capacités d'adaptation, l'être humain est capable de modifier ses
propres représentations s'il reçoit de son environnement des informations
pertinentes, notamment par rapport à ses propres actions. Un premier grand principe d'apprentissage consiste ainsi à exploiter les
capacités adaptatives de nos processus neuronaux quand ils sont soumis à la
présentation répétée de certains patterns ( processus qui ont d'ailleurs pu
être simulés par ordinateur, selon des algorithmes appelés « Réseaux de
Neurones Artificiels ». Par exemple, pour apprendre les tables de multiplication, il s'agit exposer
l'élève à de nombreux exemples de deux chiffres et du résultat de la
multiplication de ces deux chiffres, jusqu'à ce que l'apprenant soit
capable de les réciter (on parle d'apprentissage associatif). Pour ce type
d'apprentissage la notion de feedback joue un rôle essentiel. On parle
notamment de renforcement, positif quand l'environnement d'apprentissage
« récompense » une bonne réponse, « négatif » quand il punit une « mauvaise
réponse ». Ce type d'apprentissage, par le comportement, est très efficace
pour les apprentissages par coeur, les apprentissages moteurs, certains
apprentissages linguistiques (par exemple la prononciation), des
apprentissages perceptifs, l'apprentissage d'un morceau de musique par un
interprète, etc. On rattache l'apprentissage par comportement au courant béhavioriste, mais
dans ce texte et dans le cours qui s'y rattache, on n'abordera pas les
questions d'apprentissage via les courants historiques ; cela conduit en
effet trop souvent à une stigmatisation des positions, des mises en
opposition caricaturales et simplificatrices (car les courants sont bien
large et mouvementés...) et à l'introduction explicite ou implicite de
jugements de valeur. L'apprentissage par comportement n'est pas efficace pour tous les types
d'apprentissage. Dans les apprentissages complexes notamment,
l'apprentissage par comportement ne permet ni de constituer des
représentations profondes (c'est-à-dire détachées d'une famille de
situations perceptives donnée) ni de relier entre elles des représentations
variées afin de constituer l'organisation des représentations évoquée ci-
dessus. Un deuxième grand principe d'apprentissage entre alors en jeu, qui s'appuie
sur les capacités langagières de l'être humain. En effet, par le langage,
on peut décrire des représentations abstraites, ainsi que de subtiles
organisations entre les représentations. Le langage serait donc cette
« clef » qui nous permettrait « d'opérer de l'extérieur », c'est-à-dire
d'amener l'apprenant à se construire les représentations adéquates. Selon une vision extrême, qu'on appelle parfois « approche transmissive »,
le langage permet à l'enseignant de transformer ses propres représentations
de manière langagière, transmettre ces éléments langagiers à l'apprenant
qui lui-même se reconstruit en lui ses propres représentations, à
l'identique de celles de l'enseignant. En fait, cette approche transmissive
ne peut fonctionner pour les quatre raisons suivantes :
. Les représentations que l'enseignant choisit de transmettre ainsi ne
constituent qu'une partie des représentations effectivement possédées
par l'enseignant et mobilisées lors d'une situation concrète. Les
représentations qui concernent l'ancrage dans la pratique se
transmettent très difficilement par le langage. L'apprenant construit
donc des représentations cohérentes et bien articulées, mais amputées
de leur ancrage dans l'action.
. Les représentations et leur organisation sont propres à chaque
individu. Elles dépendent de l'histoire de chacun et des capacités de
chacun. Transmettre une représentation ne fonctionne donc que si, par
chance, l'apprenant dispose d'une structure cognitive analogue à celle
de l'enseignant.
. Qui plus est l'enseignant, en tant qu'expert, possède des
représentations très spécifiques, différentes de celles construites
par celui qui vient d'apprendre, le novice. Vouloir transmettre
directement les représentations d'un expert revient à « brûler des
étapes » dans le processus d'apprentissage. A ce titre,
l'apprentissage transmissif par les pairs (entre apprenants) serait
plus judicieux, même s'il n'échappe pas aux autres objections.
. Transcrire sous forme langagière ses propres représentations n'est pas
chose aisée pour l'enseignement. Au passage, il y a donc
simplification et déformation, ce qui fausse le résultat de
l'apprentissage. Mais en fait, l'apprentissage purement transmissif n'existe pas. Tout
enseignant s'efforce, quand il énonce les connaissances à apprendre, de les
mettre en situation et surtout d'amener l'apprenant à se poser des
questions afin de lui permettre de connecter ses propres représentations
existantes avec ce qui lui est appris et ainsi construire lui-même la
nouvelle organisation des représentations adéquate. Même si ces
représentations de l'apprenant s'énoncent de la même manière que celles de
l'enseignant, elles n'en sont pas moins spécifiques et construites par
l'apprenant lui-même. C'est ainsi qu'elles peuvent être efficaces. Plutôt
que d'apprentissage transmissif, nous parlerons d'apprentissage par le
discours : même si la transmission d'information est unidirectionnelle,
même s'il n'est pas demandé à l'apprenant d'agir physiquement, le discours
de l'enseignant est conçu pour mettre l'organisation cognitive de
l'apprenant en mouvement. Par exemple, pour introduire le théorème de
Pythagore, un enseignant pourra montrer un triangle, en mesurer le petit
côté, puis le grand, puis l'hypoténuse, pour faire remarquer que la
relation entre ces grandeurs n'est pas triviale. Ainsi, il amène
l'apprenant à se poser des questions. L'apprentissage par le discours ne peut donc fonctionner que si l'apprenant
est dans une démarche active de construction de ses connaissances, ce qui
nous amène à un principe d'apprentissage essentiel : on apprend dans
l'action, car seule l'action autorise une réorganisation significative des
connaissances pour intégrer en profondeur (et non pas stocker en surface)
une nouvelle connaissance. Dans l'apprentissage actif, l'action n'est plus interne mais externe :
l'apprenant agit sur son environnement pour éprouver ses représentations et
les faire évoluer. l'apprenant reconstruit sa propre connaissance, qui
éventuellement fait écho à une connaissance de l'enseignant, mais s'en
distingue fondamentalement. Fondées sur ce principe d'apprentissage, on trouvera de nombreuses théories
de l'apprentissage (constructivisme, apprentissage situé, « experiential
learning », etc.) qui vont s'attacher à préciser comment organiser un
apprentissage afin que l'action de l'apprenant fasse évoluer ses propres
représentations. En complément de l'apprentissage actif s'ajoute souvent la dimension
sociale. En effet, l'action de l'apprenant peut être dirigée vers
l'enseignant, vers l'environnement, mais aussi vers les autres apprenants.
Ainsi, l'interaction entre apprenants, généralement par le langage,
constitue un autre moyen de « mettre en mouvement » les organisations
cognitives, par des stratégies de confrontation des représentations entre
pairs. Un dernier grand principe d'apprentissage est celui d'authenticité.
L'enseignement traditionnel a tendance à se placer à un niveau assez
général, afin que se constituent chez l'apprenant des représentations
suffisamment abstraites à même de pouvoir être utilisées dans des contextes
variés. Hors on montre que les apprenants peinent alors à utiliser leurs
représentations dans d