Le Spiritisme devant la Science - ALLAN KARDEC
«Malgré le plus scrupuleux examen, nous ne pouvons trouver une analogie
entre ... Serrons de plus près le sujet et nous verrons que, de quelque manière
que l'on ..... ces apparences ne sont que le résultat de la structure intime de la
substance corticale. ...... Ce vulgarisateur de génie sème à pleines mains les
idées de la ...
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GABRIEL DELANNE __________ LE SPIRITISME
DEVANT
LA SCIENCE
__________ NOUVELLE EDITION CONFORME A LA SECONDE EDITION ORIGINALE DE 1923 UNION SPIRITE FRANÇAISE ET FRANCOPHONE Je dédie
ce livre à mes parents, dont la tendresse et la sollicitude m'ont rendu si
douces les premières années de ma vie. GABRIEL DELANNE
LE SPIRITISME
devant la Science.
___________________________________________ PREMIERE PARTIE ____ CHAPITRE PREMIER
-
AVONS-NOUS UNE AME ? Avons-nous une âme ? Telle est la question que nous nous proposons
d'étudier dans ce chapitre. Au premier abord, il semble que ce problème
peut être résolu facilement, car, dès la plus haute antiquité, les
recherches des philosophes ont eu pour objet l'homme, sa nature physique et
intellectuelle ; on pourrait croire qu'ils sont arrivés à un résultat ? Eh
bien, suivant certains savants modernes, il n'en est rien.
Les anciens, qui avaient pris pour devise la maxime célèbre : «Connais-toi
toi-même», ne se connaissaient pas ; ils se figuraient que l'homme était
composé de deux éléments distincts : l'âme et le corps ; ils avaient basé
sur cette dualité toutes les déductions de la philosophie, et voilà qu'à
notre époque, une école nouvelle prétend qu'ils se sont trompés, qu'en nous
tout est matière, que l'ancienne entité qualifiée du nom d'âme n'existe pas
et qu'il faut abjurer cette vieille erreur, fille de l'ignorance et de la
superstition.
Avant de nous incliner passivement devant cet arrêt, nous désirons examiner
si réellement les arguments fournis par les matérialistes ont toute la
valeur qu'ils veulent leur attribuer. Nous essaierons de les suivre sur
leur terrain, et nous tenterons de démêler ce qu'il y a de vrai et de faux
dans leurs théories. Nous mettrons en regard de leurs travaux les
conclusions impartiales de la science et de la spéculation modernes. De
cette comparaison naîtra, nous l'espérons, la certitude qu'il existe bien
en nous un principe indépendant de la matière, qui dirige le corps et que
nous appelons l'âme.
A ceux qui douteraient de l'utilité pour l'homme du principe spirituel,
nous répondrons : Il n'est pas de sujet plus digne d'attirer notre
attention, car rien ne nous intéresse plus que de savoir qui nous sommes,
où nous allons, d'où nous venons ?
Ces questions s'imposent à l'esprit à la suite des événements douloureux
dont nul n'est exempt ici-bas. L'âme déçue et mutilée se replie sur elle-
même, après les combats de l'existence, et se demande pourquoi l'homme est
sur la terre, si sa destinée est de souffrir toujours ? Lorsque nous voyons
le vice triomphant étaler sa splendeur, qui de nous n'a pensé que les
sentiments de justice et d'honnêteté sont de vains mots, si, après tout, la
satisfaction des sens n'est pas le but suprême auquel aspirent tous les
êtres ?
Qui de nous, ayant ardemment poursuivi la réalisation d'un rêve, ne s'est
senti le coeur vidé et l'âme désabusée après l'avoir atteint ? Qui de nous
ne s'est dit, alors que le tourbillon de l'existence lui laissait un
instant de repos : Pourquoi sommes-nous sur la terre et quel sera notre
avenir ?
Le sentiment qui nous pousse à cette recherche est déterminé par la raison,
qui veut impérieusement connaître le pourquoi et le comment des événements
qui s'accomplissent autour de nous. C'est elle qui nous met au coeur le
désir d'approfondir le mystère de notre existence. Si au milieu du fracas
des villes ce besoin s'impose quelquefois à notre esprit, avec quelle force
plus grande encore il nous saisit lorsque, quittant les cités populeuses,
nous nous trouvons face à face avec la nature immuable, éternelle. Lorsque
nous contemplons les vastes horizons d'un paysage immense, le ciel profond
parsemé d'étoiles, il nous semble que nous sommes bien petits dans
l'ensemble de la création. - Lorsque nous songeons que ces lieux où nous
sommes ont été foulés par d'innombrables légions d'hommes qui n'ont laissé
d'autres traces que la poussière de leurs ossements, nous nous demandons
avec angoisse pourquoi ces hommes ont vécu, aimé et souffert ?
Quelles que soient nos occupations, quelles que puissent être nos études,
nous sommes invinciblement ramenés à nous occuper de notre destination,
nous sentons la nécessité de nous connaître et de savoir en vertu de
quelles lois nous existons.
Sommes-nous le jouet des forces aveugles de la nature ? Notre race,
apparaissant sur la terre après tant d'autres, n'est-elle qu'un anneau de
cette immense chaîne des êtres qui doivent se succéder à sa surface ? ou
bien, est-elle l'épanouissement de la force vitale immanente de notre
globe ? La mort, enfin, doit-elle dissoudre les éléments constitutifs de
notre corps pour les replonger dans le creuset universel ou conservons-nous
après ce changement une individualité pour aimer et nous souvenir ?
Tous ces points d'interrogation se dressent devant nous aux heures de doute
et de réflexion, ils enserrent l'esprit dans le réseau d'idées qu'ils
suscitent et obligent l'homme le plus indifférent à se demander : L'âme
existe-t-elle ?
Coup d'oeil sur l'histoire de la philosophie. Les philosophes les plus anciens dont l'histoire nous ait conservé le
souvenir croyaient que nous étions doubles, qu'en nous résidait un principe
intelligent directeur de la machine humaine, mais ils n'avaient pas
approfondi les conditions de son fonctionnement. Leurs vues générales
étaient assez vagues, car ils voulaient découvrir la cause première des
phénomènes de l'Univers. Dans leurs recherches, ils ne s'appuyaient que sur
l'hypothèse ; aussi la théorie des quatre éléments qui résulte de leurs
travaux fut-elle abandonnée. Mais un fait bien digne d'attention, c'est que
Leucippe admettait, pour expliquer le monde sensible, trois choses : le
vide, les atomes et le mouvement, et il se trouve aujourd'hui que ses
déductions sont en grande partie adoptées par la science contemporaine.
Avec Socrate apparut l'étude méthodique de l'homme : ce grand esprit
établit l'existence de l'âme par des raisonnements d'une extrême logique.
Son disciple Platon poussa plus loin encore cette croyance. Le philosophe
de l'Académie admettait, à l'exemple de Pythagore, un monde distinct des
êtres matériels : «le monde des idées». Selon Platon, l'âme connaît les
idées par la raison, elle les a contemplées dans une vie antérieure à
l'existence actuelle. Voilà une nouveauté ; jusque-là on s'était borné à
croire que l'âme était faite en même temps que le corps ; la théorie
platonicienne enseignait qu'elle vit antérieurement : nous verrons par la
suite combien ses déductions sont justes.
Aristote, surnommé le prince des philosophes, est aussi spiritualiste que
ses prédécesseurs, et il faut reconnaître que l'antiquité tout entière a
cru à l'existence de l'âme, sinon à son immortalité. Les luttes entre les
différentes écoles portaient plutôt sur des divergences dans l'explication
des phénomènes de l'entendement que sur l'âme elle-même.
C'est ainsi que se créa la secte sensualiste dont les représentants les
plus illustres furent Leucippe et Epicure. Ce dernier plaçait le point de
départ de toutes les connaissances dans la sensation. Il admettait bien
l'âme, mais la croyait formée d'atomes et, par conséquent, incapable de
survivre à la mort du corps. C'était donc, en réalité, un matérialiste, et
il se trouvait en opposition formelle avec les idéalistes représentés par
Socrate, Platon et Aristote.
Zénon peut être rattaché à cette école, mais, à la différence d'Epicure, il
séparait la sensation des idées générales et les sens de la raison. Sans
aller aussi loin que les cyniques, les stoïciens considéraient
indifféremment les plaisirs et les peines. Ils croyaient immorales toutes
les actions s'écartant de la loi et du devoir. Cette sévérité de principes
fut pendant plusieurs siècles la force de l'humanité et la seule digue
opposée aux passions déchaînées de l'antiquité païenne.
L'école néoplatonicienne d'Alexandrie fournit de lumineux génies, tels
qu'Origène, Porphyre, Jamblique, qui surent s'élever jusqu'aux plus
sublimes conceptions de la philosophie. Ils admirent la préexistence de
l'âme et la nécessité du retour sur la terre. Ils croyaient que l'homme est
incapable d'acquérir en une seule fois la somme des connaissances
nécessaires pour s'élever vers une condition supérieure, et ils ont défendu
ces nobles doctrines avec un courage et une audace sans pareils contre les
sectaires du christianisme naissant.
Proclus fut le dernier reflet de ce foyer intellectuel, et l'humanité est
restée de longs siècles ensevelie sous les épaisses ténèbres du moyen âge.
Cette époque croyante ne doutait pas de l'âme et de son immortalité, mais
les dogmes de l'Eglise, qui s'adaptaient merveilleusement à l'esprit
barbare de ces nations arriérées, étaient devenus impuissants en face du
réveil des consciences.
L'ancienne philosophie s'appuyait sur la raison ; la théologie de saint
Thomas d'Aquin ne reposait que sur la foi, et les tentatives
d'affranchissement qui étaient le résultat du divorce entre la foi et la
raison étaient cruellement punies.
Le progrès étant une loi de notre globe, un moment devait arriver où le
réveil des intelligences s'effectuerait : c'est ce qui eut lieu avec Bacon.
Ce savant, fatigué des querelles des scolastiques qui s'épuisaient en des
discussions stériles, ramena l'attention sur l'étude de la nature ; avec
lui fut créée la science inductive. Il recommanda avant tout l'ordre et la
classification dans les recherches : il voulut que la philosophie sortît de
ses anciennes limites ; il ouvrit un champ nouveau à ses investigations et
la dota de l'observation comme