L'intelligence en trop - Créer son école

Les journalistes ou les politiques, inclinés à prendre les phénomènes ....
Programmes, sujets d'examen et notations se sont adaptés à cette population
nouvelle. ...... c'est-à-dire Maths, PC, SVT, pour les élèves du tronc commun SVT,
et Maths, ...

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L'intelligence en trop
L'échec scolaire des enfants à haut potentiel
Article de Catherine Rouvier-Mexis, écrit dans Liberté politique, n° 32
En 1905, il y a tout juste cent ans, à la demande du gouvernement
français, le scientifique niçois Alfred Binet publiait une échelle métrique
de l'intelligence. Cette échelle avait pour but de mesurer le développement
de l'intelligence des enfants en fonction de l'âge. Par la suite il
proposera des améliorations qui seront à la base des tests de quotient
intellectuel (Q.I.). La surprise est venue du fait que l'échelle de Binet,
prévue au départ pour déceler les enfants dont le niveau intellectuel
serait en dessous de la moyenne et leur proposer une éducation adaptée, a
permis aussi de déceler un certain nombre, statistiquement symétrique,
d'enfants dont l'âge mental était en avance par rapport à la moyenne. La
proportion de ces enfants dont le Q.I. dépasse le chiffre de 125 était
estimé en 1965 dans une étude de l'INED, à environ 5 % sur un échantillon
de 100.000 élèves. Or ces enfants dont le Q.I. se trouve au dessus de la moyenne ont, eux
aussi, besoin d'un traitement spécial du point de vue éducatif car leur
différence se traduit très souvent par des problèmes d'adaptation au
système scolaire qui génèrent des échecs parfois irréversibles. Aujourd'hui un autre Niçois, Jean-Claude Terrassier, directeur du
premier lycée pour enfants précoces, à Nice, a fini par obtenir de
l'Éducation nationale qu'elle se penche sur ce problème. Mais les études
consacrées aux élèves intellectuellement précoces dans les circulaires,
rapports, décrets et lois sont comme des balises trop discrètes et trop
éparpillées pour être aptes à guider, sur un océan de malentendus, de
préjugés et d'incompréhensions, les enfants en difficulté vers le rivage du
succès. Il est urgent d'agir à cause du gâchis que peut représenter le
paradoxe de l'échec scolaire chez des enfants dont les capacités
intellectuelles sont supérieures à la moyenne mais aussi parce qu'enfants
et familles souffrent[1], et que cette souffrance conduit à la violence et
à la délinquance. Les EIP en échec scolaire sont ballottés de l'école
publique à l'école privée sous contrat, puis de l'école privée sous contrat
à l'école privée hors contrat, parfois même, en désespoir de cause, envoyés
à l'étranger, quand les parents le peuvent - car la précocité et le « sur
don » touchent toutes les catégories sociales - il faudra recourir aux
domiciliations de complaisance ou à l'éloignement pour trouver d'autres
établissements quand l'ennui, le manque de concentration, la turbulence,
voir la violence de leur enfant l'aura fait exclure de son école. C'est
l'ennui qui « déconnectera » souvent définitivement l'enfant des études
générales le conduisant à intégrer des classes techniques ou un
apprentissage, qu'il fuira rapidement, car il n'y est pas du tout adapté.
Et bienheureux encore s'il ne tombe pas dans la consommation de cannabis,
prélude au crack, à l'ecstasy ou à l'héroïne... Pour pouvoir agir, il faut, après un état des lieux de l'existant (I),
définir l'enfant intellectuellement précoce (II) et tracer des pistes pour
trouver des solutions adaptées (III).
I- État des lieux
Le phénomène des EIP est mal connu et mal compris, ce qui provoque à
la fois un rejet vis-à-vis de ces enfants et une inadaptation des
Solutions proposées au sein de l'éducation nationale. Un phénomène mal compris qui provoque soupçon et rejet
Le péché d'« élitisme » Le rapport de l'inspection de l'Éducation nationale de 2004 le
souligne : « La rareté - jusqu'au printemps 2002- de la parole officielle
sur la précocité intellectuelle en dit long sur le soupçon qui pèse sur la
question. À l'exception notable de l'Académie de Lyon, aucun rectorat,
aucune inspection ne semblait, à l'époque de l'enquête, avoir encore
inscrit parmi ses préoccupations la scolarisation des EIP. » On comprend
pourquoi en lisant le compte rendu du Conseil supérieur de l'Éducation du 5
juillet dernier qui affirme : « Nous ne sommes pas défavorables à ce que
les besoins spécifiques des élèves qualifiés d'intellectuellement précoces
soient pris en compte par l'institution (encore que la définition d'EIP
porte à confusion) mais nous contestons la logique qui consiste à creuser
encore les écarts en termes de réussite scolaire en ayant plus d'ambition
pour ceux qui semblent avoir des facilités ou qui manifesteraient des
"aptitudes particulières" et en offrant moins à ceux qui ne semblent pas
surmonter leurs difficultés. » De fait, les rares recteurs ou proviseurs qui ont accepté de les «
accueillir », c'est-à-dire de réunir deux classes en une ou d'autoriser les
sauts de classe, se cachent derrière leur petit doigt. Ils ont honte. Des
classes d'élite : le mot fait mal ! La méfiance des professeurs et des établissements. À ces réticences
manifestes, les inspecteurs généraux dans leur rapport de 2004 donnent deux
raisons essentielles. Une de nature idéologique : « On craint, à tort ou à
raison, l'apparition de classes d'élite pour surdoués. » Mais aussi une
autre, de nature pédagogique : « Le degré d'exigence intellectuelle des EIP
fait peur à des enseignants assis dans leur routine. » Et les inspecteurs
ajoutent : « Dans quatre cas sur cinq, le projet d'accueil ou de prise en
charge spécifique d'élèves intellectuellement précoces s'est au départ
heurté à l'hostilité voire à l'opposition des conseils d'administration des
établissements concernés. Quant à l'institution au sens large (inspections
académiques, rectorats, ministère), elle s'est pour l'essentiel contentée
de prendre acte des initiatives et d'observer le mouvement, plutôt à
distance et parfois avec une certaine circonspection. » Le rejet fondé sur des présupposés. Le plus souvent, dans les établissements, on ne veut même pas en
entendre parler. Il suffit alors que les parents prononcent le mot, et une
cohorte de professeurs courroucés s'acharne à leur démontrer que « tous les
enfants sont identiques » et que la réussite est uniquement « une question
de travail ». Ce rejet repose sur trois erreurs courantes. 1/ Tous les surdoués réussissent, la seule chose à faire est donc
d'autoriser les sauts de classe ou les « deux classes en un an ». C'est
faux, et la plupart de ceux qui sont détectés et donc étiquetés comme «
surdoués » sont justement ceux qui échouent. 2/ Tous les surdoués sont issus d'un milieu privilégié. C'est faux, même si
certains tests de verbalisation ont pu le faire croire car ceux-ci
employaient un vocabulaire et usaient de références culturelles non
intégrées quand l'enfant appartenait à un milieu peu instruit. Des
adaptations des tests ont permis de redresser cette erreur. 3/ Les parents s'imaginent le plus souvent que leur enfant est surdoué.
Cela flatte leur ego. C'est faux. Qu'il y ait des affabulateurs, c'est une
chose. Mais les parents des enfants testés ont en général, auparavant,
suivi d'autres pistes - dyslexie, névrose ou psychose, autisme léger,
schizophrénie - et sont surpris du diagnostic. La plupart hésitent à faire
état des résultats du test de WISC[2], sachant très bien qu'on va, dès ce
moment, considérer leur enfant, non avec la compassion qu'il mérite pour
ses difficultés scolaires, mais avec suspicion. Ils ne pensent qu'à la
souffrance de l'enfant, et à lui éviter la nième brimade, punition, le
nième renvoi ou un redoublement dont ils savent qu'il aggraverait peut être
irrémédiablement la situation, et non pas à une quelconque gloire à en
tirer. On n'exhibe pas un test de QI comme le résultat d'un concours. Cependant ces préjugés auront encore longtemps la vie dure et il importe
donc d'en parler autrement. Les inspecteurs le disent très bien : « Compte
tenu du caractère sensible voire irrationnel du dossier [...], le ministère
devra trouver la forme et les termes d'une communication appropriée autour
d'un phénomène qui, en l'état actuel des mentalités, charrie fantasmes,
fascination et réactions de rejet. »
Des mécanismes d'aide et de soutien actuels inadaptés
Les mesures d'aide et de soutien tournent toutes autour du problème
des rythmes. Ainsi que le recense le rapport de 2004 il s'agit
essentiellement de : - regroupement des élèves intellectuellement précoces dans des classes
spécifiques sur tout (de la sixième à la troisième) ou partie (en sixième
uniquement) de leur parcours de collégiens; - ou, à l'inverse, répartition des EIP dans des classes « normales »
complétée par la mise en place, sous la conduite d'un professeur référent,
d'un système de tutorat individualisé et contractualisé; - ou encore, regroupements spécifiques mais inter niveaux (réunion des
élèves de sixième et de cinquième, par exemple). Or si les lycées du Vésinet ou de Nice, dirigés par de véritables
spécialistes de la question, ont répondu aux attentes d'une poignée de
privilégiés (il faut inscrire son enfant dès le CP pour avoir une chance de
lui réserver une place !) les autres établissements répertoriés par
l'Association nationale des enfants intellectuellement précoces (tels le
collège et lycée Gerson à Paris) qui ont appliqué la première et la
troisième formule (regroupement des IEP dans les classes « Primevère »,
sauts de classes et réunion de deux classes d'un cycle en une), ont pu
constituer pour les parents une étape reposante car leur enfant, enfin,
n'était plus tout seul de son espèce, ne sont pas r