Gestion du centre de santé de Bérégadougou et ... - cidegef

Gestion du centre de santé de Bérégadougou et démocratie locale Cyrille Koné Université de Ouagadougou
Introduction Le centre social pour la promotion de la santé (CSPS) de Bérégadougou
fut créé en 1987, au milieu des années 1983-1991 qui ont connu
l'instauration au Burkina Faso du régime politique révolutionnaire des
capitaines Thomas Sankara et Blaise Compaoré qui ambitionnaient de donner
au peuple tout le pouvoir, c'est-à-dire de l'impliquer à la fois dans le
processus de conception et d'exécution des projets de développement.
L'ensemble du pays a connu à cette époque l'expérience socialiste et
endogène de développement, centrée sur la participation des populations à
la base. Les habitants des villes, des villages furent invités à compter
sur eux-mêmes, à prendre en main leurs propres affaires pour les gérer au
mieux. C'est dans ce contexte que fut construit le CSPS de Bérégadougou à
partir des ressources propres de la population locale et avec l'appui de
l'État burkinabe.
Dans la situation de la commune de Bérégadougou qui, au Burkina Faso,
abrite proportionnellement à sa population, l'une des plus grandes colonies
d'ouvriers travaillant dans l'industrie sucrière et la production d'alcool,
le centre s'est donné entre autres objectifs de promouvoir la santé par la
prévention, la vaccination et la sensibilisation des populations, de donner
les premiers soins médicaux, d'assurer la planification familiale, la
supervision et l'évaluation des activités de santé au niveau local, etc.
Au vu des objectifs poursuivis, les moyens d'action actuels du CSPS de
Bérégadougou paraissent encore maigres car pour une population sanitaire
d'environ 8000 personnes et constituée majoritairement de paysans, le
centre dispose de 2 infirmiers, 2 maïeuticiennes, 1 assistante sociale, 1
secrétaire médico-sociale, d'un médecin en ambulatoire depuis 2002 et d'une
ambulance en 2003.
(le fondement juridique ? ...)
On ne peut raconter l'expérience du CSPS de Bérégadougou sans se
demander comment cette institution est gérée par le comité de gestion qui a
été mis en place au début de l'expérience burkinabe de la décentralisation
en 1995. La gestion du centre de santé est-elle démocratique ? Qu'est-ce
qui permet de soutenir la comparaison entre cette structure sanitaire à la
situation sociale précaire d'un pays africain sous développé, appartenant
aux pays pauvres avec celle d'un pays européen industrialisé, développé et
riche ? Pour cerner l'image du CSPS de Bérégadougou et comprendre sa
gestion, je me propose d'indiquer d'abord l'état de la structure socio-
sanitaire eu égard aux exigences de la démocratie locale. 1e Partie État du CSPS de Bérégadougou à la lumière de la démocratie locale Dans l'organisation pyramidale du système des institutions de santé au
Burkina Faso, le CSPS constitue la structure de base qui est offerte aux
communautés pour leur procurer les premiers soins médicaux. Le slogan
consacré à l'époque « révolutionnaire » du Burkina Faso était : « un
village, un poste de santé primaire ». Le centre de Bérégadougou correspond
au poste de santé primaire, au dispensaire qui assure l'interface entre les
populations et les structures sanitaires de niveau supérieur,
présentées par ordre décroissant comme suit :
- le CHU, (centre hospitalier universitaire) mieux équipé, est à peu
près pourvu en spécialités et en personnel qualifié pour régler différents
problèmes complexes de santé.
- Le CHR (centre hospitalier régional), en plus des médecins
généralistes, dispose, assez souvent, de quelques spécialités et
d'équipements appropriés. Il peut prendre en charge, selon les situations,
des problèmes particuliers de santé.
- Le CM (centre médical) assure les actes médicaux généraux. Il
dispose d'un équipement simple, d'un médecin en permanence en plus
d'infirmiers (es), de maïeuticiens (nes) et de secrétaires médico-sociales.
- Le CSPS, situé au plus bas niveau, joue le rôle de dispensaire et
assure la promotion de la santé au plan local avec un équipement
rudimentaire, des infirmiers (es), des maïeuticiens (nes). A) Organisation du CSPS de Bérégadougou L'aire de santé du CSPS de Bérégadougou est constituée par les 5
secteurs (quartiers) de la commune et du village de Malon. Le village
considéré et chacun des secteurs pris individuellement, forment une cellule
de santé constituée par les habitants du territoire donné.
Les six cellules de santé élisent chacune, pour deux ans renouvelables
2 fois, cinq représentants ou responsables qui forment les comités de base
chargés des affaires sanitaires du secteur ou quartier considéré. La
plupart du temps, l'élection des représentants des cellules mobilise les
populations, elle est publique : on fait le choix de son candidat en se
mettant derrière lui. L'élection des responsables a lieu le même jour dans
tous les secteurs ainsi qu'à Malon. C'est une élection qui est soumise au
respect de règles comme le lieu (quartier) de résidence, les conditions
d'éligibilité, etc.
Ce sont ensuite les 30 représentants des secteurs de Bérégadougou et
de Malon qui se réunissent pour élire à bulletin secret le bureau du comité
de gestion du CSPS. Celui-ci est mis en place pour une durée de deux ans
renouvelables 2 fois également. Le comité de gestion est composé de six
membres dont :
- 1 président et 1 vice président,
- 1 trésorier et 1 trésorier-adjoint,
- 2 commissaires aux comptes.
Le comité de gestion se réunit une fois par mois pour délibérer sur
les affaires sanitaires de la commune, les dépenses, les recettes. Il
convoque la population de l'aire de santé en assemblée générale à peu près
une fois par trimestre et chaque fois que cela est nécessaire, en fonction
de l'opportunité, pour rendre compte des activités, donner des
informations, discuter des dépenses, des recettes du CSPS, etc. B) Fonctionnement du CSPS de Bérégadougou Le CSPS de Bérégadougou fonctionne grâce aux ressources générées par
les actes médicaux qui y sont pratiqués (les consultations, les
hospitalisations, les accouchements, etc.), les cotisations semestrielles
ou annuelles des populations, selon le cas, pour faire face aux dépenses
d'entretien de l'ambulance et de la réfection des locaux du centre. Il y a
aussi l'investissement, la mobilisation de certaines catégories de la
population pour l'exécution de travaux, etc.
Deuxièmement, le CSPS est appuyé par les dons en nature et en espèce
de particuliers et d'institutions, (par exemple les associations
caritatives, les partenaires de la coopération décentralisée de Marcoussis
en France, mais aussi les amis et les cadres originaires de Bérégadougou).
Enfin l'État aussi appuie le CSPS en matériel et en équipement
sanitaires. Mais l'aide du gouvernement reste variable et liée à la
géopolitique locale, nationale.
Si la population ne participe pas directement au contrôle des
ressources du CSPS et à la surveillance des comptes, elle exerce toutefois
son contrôle par l'intermédiaire des deux commissaires aux comptes élus à
cet effet. Les assemblées générales de l'aire de santé permettent aux
populations, en principe, de demander des comptes, de faire des
suggestions, des observations.
Avec les fonds recueillis, le comité de gestion du CSPS assure le
paiement des dépenses en eau, en électricité, en matériel de santé, etc. Il
semble que la part de l'appui apportée par les associations, les
partenaires de la coopération décentralisée, les natifs de Bérégadougou
tend, au fil des ans, à rattraper la contribution directe des populations
dont une part de plus en plus grande peine à obtenir un emploi saisonnier à
la Société Sucrière de la Comoé (SOSUCO) et à la Société de Production
d'Alcool (SOPAL) du fait de la privatisation et de la restructuration de
ces entreprises.
On peut parler d'un partage équilibré des charges de fonctionnement du
CSPS de Bérégadougou entre les populations locales, les partenaires au
développement et l'État burkinabe. Chacune des 3 entités, selon les
entretiens et les documents consultés, contribuent sensiblement pour un
tiers au fonctionnement du centre qu'on tente de gérer selon les normes
démocratiques. Mais la question de l'évaluation des activités du centre par
les usagers se pose. A-t-on souci d'évaluer le CSPS et comment cela se
fait ? Les résultats de l'évaluation sont-ils connus des populations ?
Quels réformes mener pour une plus grande efficacité, utilité du CSPS ? 2ème Partie Image du CSPS à la lumière de la démocratie locale Ici se pose la question fondamentale du modèle de gestion du CSPS. A) La politique de communication du CSPS de Bérégadougou
La politique de communication du comité de gestion du CSPS en matière
socio-sanitaire reste dans l'ensemble informelle et traditionnelle. Si on
note que les populations ont la latitude de se faire entendre,
paradoxalement aucun moyen préservant de la tracasserie ne leur est donné
concrètement pour leur permettre d'apprécier les activités et la gestion du
centre. Le flou qui caractérise la politique de communication favorise la
perpétuation des influences. L'anonymat doit être requis pour que les
usagers qui portent un regard critique ne soient pas exposer à la colère
des membres du comité de gestion. Le fait qu'il n'existe pas de cadre
confortable, préservant l'an