Colloque international « L'éducation à la culture ... - Hal-SHS

Cet examen conduit à la description de différents scénarios de savoirs et à la
prise en compte .... L'incertitude en cours d'action, la logique ouverte des usages,
autant que l'association ..... [7] D. Dubois, « Comment l'homme communique-t-il ?

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RAPPORT A L' INFORMATION ET SAVOIRS DU NUMERIQUE : VERS UNE EXPERTISE
PEDAGOGIQUE Franc Morandi
Professeur des Universités
Université Montesquieu Bordeaux IV- IUFM d'Aquitaine
UNR Aquitaine
Institut de Cognitique, EA 487, Université V. Segalen Bordeaux 2 Résumé :
Le déploiement des pédagogies dans les espaces numériques informationnels
s'accompagne d'une redéfinition des « formes du savoir ». Institution
pédagogique et espaces numériques de travail échangent leurs finalités.
L'article développe une analyse des formes de savoir et des modèles
pédagogiques associés au développement du numérique. Trois moments sont
proposés : une exploration du lien entre l'institution pédagogique et le
numérique, une enquête sur les scénarisations pédagogiques et les modèles
numériques du savoir, enfin, un analyse pédagogique des formes de savoirs
« numériques » et du rapport à l'information. Il interroge la place de
l'expertise pédagogique dans la conception de projets. Cet examen conduit à
la description de différents scénarios de savoirs et à la prise en compte
de l'écologie complexe de la connaissance. Une éducation à l'information
articule une ingénierie pédagogique, organisant la logique ouverte des
espaces numériques, et une formation à toutes les formes numériques du
savoir. Mots clés :
Savoirs du numérique, expertise pédagogique, système d'information, rapport
à l'information, éducation à l'information. Le développement des dispositifs numériques en matière
d'apprentissage et de formation pose la question de l'association de
l'institution pédagogique et du numérique. Quelles sont les destinations
pédagogiques des espaces numériques de travail, quelles en sont les
logiques pédagogiques? Pour les uns l'accent doit être mis sur les
fonctionnalités et les niveaux d'organisation des données, des réseaux et
des systèmes et leur développement « naturel » dans les scénarios
pédagogiques. Pour les autres les réponses se trouvent dans les usages
effectifs (des stratégies individuelles aux usages sociaux) des
technologies numériques. Deux logiques organisatrices sont alors supposées
et non réellement articulées. Une réflexion exploratoire est proposée,
considérant le rapport entre les dispositifs informationnels et médiatisés
et les scénarios d'enseignement et d'apprentissage. Leur conception suppose
d'articuler systèmes d'information[1] (SI) et systèmes d'enseignement et de
formation (SEF). C'est de leur synergie que dépendent la compréhension,
l'appropriation et les bons usages des espaces de savoir.
Les éléments proposés interrogent l'intention pédagogique de cette
association, des dispositifs aux systèmes et aux réseaux d'information.
Deux perspectives complémentaires sont associées : une réflexion (théorique
et pragmatique) sur cette relation au savoir ; le souci d'observer les
scénarios pédagogiques associés aux pédagogies « numériques » et
d'organiser l'espace d'enseignement. Trois moments sont proposés : une
exploration du lien entre l'institution pédagogique et le numérique, une
enquête sur les scénarisations pédagogiques et les modèles numériques du
savoir, enfin, un analyse pédagogique des formes de savoirs « numériques »
et du rapport à l'information.
1. L'INSTITUTION PEDAGOGIQUE ET LE NUMERIQUE
La société pédagogique
Comment se pose le problème pédagogique dans le contexte du développement
des technologies de l'information et les réseaux numériques ? Le
rôle pédagogique serait, pour certains, à re-concevoir à partir des
propriétés transactionnelles, sociales et cognitives du médium . La
transaction devenant transmission à travers une technique mise au service
d'un travail intellectuel. Un autre point de vue considère que le problème
n'est pas celui de l'adaptation de la pédagogie aux nouvelles conditions de
l'espace informationnel, mais celui du développement d'une « société
pédagogique » qui en redéfinit les rôles. Numérique et pédagogique
participent à un modèle de société (cf. la « société pédagogique » de M.
Serres, 1996) où la connaissance devient un processus social
« externalisé », piloté à travers des « outils cognitifs » et mettant en
scène des modes complexes de circulation du savoir. La généralisation des
« apprentissages instrumentés » (Rabardel, 1995), dans leurs dimensions
techniques et organisationnelles, leur inclusion dans les espaces
numériques de travail, s'accompagnent nécessairement d'une réalisation et
d'une évolution de l'activité et du rôle pédagogique[2]. Tout dispositif
serait en ce sens une manifestation matérielle et symbolique d'une
intention pédagogique.
L'institution pédagogique et l'information
Le développement des systèmes d'information « sociotechniques » fait de
l'accès et du rapport à l'information (Morandi, 2007) des éléments
organisateurs qui mobilisent le rôle pédagogique. Selon l'expression de
Dupuy et Robert, l'interface, associé à la disparition de la concentration
du savoir, « rompt le face à face ». Trois fondements sont réorganisés
comme variables pédagogiques : les stocks de savoir (concentrés -
distribué), les facultés humaines (« la mémoire, par exemple, descend dans
les ordinateurs, comme, jadis et naguère, elle descendit dans les tablettes
ou les livres », Serres, 1996) ; enfin, l'espace collectif servant de trame
à l'échange des savoirs. Ce développement constitue une recomposition du
champ pédagogique et sa réorganisation autour du fonctionnement
intellectuel (notamment par la dimension réflexive et intentionnelle des
échanges de savoir). A une nouvelle institution sociotechnique,
correspondrait un changement de modèle. Le rapport à l'information
figurerait comme moteur et organisateur premier, « fabrique du temps
didactique » (Serres). Doivent alors être considérés les éléments qui
guident le travail pédagogique au sein du numérique.
C'est sous la forme de connaissance partagée (Morandi, 2004) que peuvent
être considérés ces liens. Les technologies numériques nous conduisent à
reconstruire et à réaliser les scénarios pédagogiques dans l'écart entre
information et savoir, dans la réalisation d'un système informationnel et
cognitif qui représente les conditions et l'exercice de la circulation et
de la construction des savoirs. La pédagogie se réorganise à travers les
modes externalisés et les facteurs techniques et humains de
l'apprentissage, supposant une alliance cognitive des techniques et des
usages (définissant l'homme augmenté dans le cadre d'une cognition
distribuée et située)[3] . Cette alliance est celle de l'intention
informationnelle (une information est une donnée associées à une intention,
celle de faire savoir) et donc celles de l'externalisation des modes
pédagogiques sur des réseaux techniques.
Système d'information et système d'enseignement et de formation: quels
rapports ?
Le développement des systèmes d'information, comme agent « sociotechnique »
producteur de nouveaux modes d'éducation ou de relais des anciens, fait de
l'accès à l'espace numérique de travail un élément organisateur du système
d'enseignement. On pourrait ainsi parler d'une intégration « naturelle »
d'apprentissages instrumentés. Mais l'origine structurelle et dynamique des
systèmes d'information suffit-elle à expliquer ou à produire des logiques
pédagogiques ou/et des logiques d'usages? En fait, SE et SEF ne se
ressemblent pas, tout en entretenant une réelle interdépendance. Leur
rapports s'inscrivent dans des écarts qui relèvent de besoins et d'usages,
de logiques pédagogiques associées à une ingénierie de formation. D'où
provient cet écart ? Les différents systèmes d'information ont comme
mission première d'organiser le savoir de manière à le rendre accessible à
l'usager. Pourtant, ces systèmes restent faits de combinaisons multiples
qui mêlent différents supports d'information, différents langages,
différents modes d'accès. Une succession d'opérations intellectuelles et
physiques (liée à la présence d'un « écran » supplémentaire) entre
l'apprenant et l'information influencent la manière dont le savoir est
organisé et présenté, et offrent une sensation d'accumulation (« obésité
informationnelle »), qui génère à son tour une série d'efforts mentaux,
pour tout usager désireux d'entrer dans la logique des systèmes.
L'investissement d'un système d'information serait également, à un niveau
propre à la conduite d'un projet de formation ou d'un apprentissage,
révélatrice de « règles » implicites, spécifiquement pédagogiques. Ces
règles concevraient un bon usage dès lors que l'on se trouve confronté
simultanément aux contraintes liées à la mise en ?uvre technique et à son
propre apprentissage, et aux modes de relation proposés. L'incertitude en
cours d'action, la logique ouverte des usages, autant que l'association
problématique d'un aspect fonctionnel à une fonction innovatrice,
conduisent à observer d'une manière plus précise la dépendance au numérique
dans le processus d'éducation, ne la limitant pas à la maîtrise d'une
action finalisée. Le cadre pédagogique doit définir les conditions d'une
mise en ?uvre qui assurent ce bon usage. 2. LES FORMES NUMERIQUES D