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Université de Provence ? Aix Marseille 1 ? Centre Saint Charles ... c) La mission
interministérielle pour la qualité des constructions publiques (MIQCP) ..... dans
lesquels interviennent une série d'acteurs au premier rang desquels le ...... En
1977, on assiste au développement de l'intervention de l'Etat en faveur d'une
qualité ...

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L'histoire dans le second degré en France au prisme de l'immigration
musulmane : des programmes aux manuels ([1]) Françoise LORCERIE, CNRS, IREMAM, Aix-en-Provence Résumé En France, les questions de l'Islam et de la colonisation-décolonisation
sont apparues au programme de l'histoire scolaire à partir du milieu des
années 1970. Une étude fine de l'évolution des programmes d'histoire au
second degré montre comment ces questions y ont été progressivement
insérées. On s'intéresse ensuite à la façon dont les manuels d'histoire
ont interprété les programmes pour en faire des leçons. Dans le cas de la
guerre d'Algérie, les manuels ont peut-être servi de banc d'essai aux
programmes Mots-clés : Islam, colonisation-décolonisation, histoire scolaire,
programmes, manuels Summary In France, the subjects of Islam and colonizing-decolonizing were taught
from the 1970'. First, the chapter examines the history syllabus, showing
how it progressively included these subjects up to 2010. Second, it turns
to the way history textbooks have interpreted the curriculum to provide
lessons on these matters. As far as the Algerian war is concerned,
textbooks could have been bench tests for the syllabus. Key words: Islam, colonizing-decolonizing, history, syllabus, textbooks
« Le discours sur l'histoire conçue comme vecteur d'une mémoire dans
laquelle puissent communier tous les Français » est plus vieux que la
République en France, comme le montrent les travaux historiques sur
l'enseignement de l'histoire (Garcia Leduc, 2003, p. 50-51, Bruter,
2007). Il remonte au moins à Guizot, qui écrivait : « L'histoire c'est la
nation, c'est la patrie à travers les siècles ». Il parlait de sa
politique en ces termes : « J'avais à c?ur de faire rentrer la vieille
France dans la mémoire et dans l'intelligence des générations
nouvelles ». Pour lui comme pour Lavisse un peu plus tard et pour les
penseurs de l'école républicaine, l'histoire que l'on écrit et que l'on
enseigne est un « opérateur de réassurance » nationale, elle associe
intimement une visée cognitive et une finalité politique. Aujourd'hui, la
modalité politique et tendue vers l'avenir de l'histoire enseignée
officiellement n'est plus la même qu'à l'époque de Guizot ou de Lavisse.
Elle est moins patriotique, elle inclut une part de critique et
d'internationalisme, on le verra. Mais la dimension politique du
curriculum, passant spécifiquement par l'histoire, demeure sensible.
Cette part politique intégrée au projet d'enseignement de l'histoire dans
les Etats-nations contemporains se laisse lire comme une variante du
programme anthropologique de l'histoire tel que Koselleck nous a appris à
le comprendre : l'histoire est toujours encastrée dans un « horizon
d'attente » qui l'oriente essentiellement (Koselleck, 1990). Tous les
Etats contemporains ont besoin d'assurer l'avenir par la
« communalisation » nationale (pour reprendre le concept de Weber). Ils
s'efforcent de favoriser celle-ci notamment par l'école publique. Et
l'histoire est souvent une composante privilégiée du curriculum à cette
fin. Dans cette perspective, la question se pose de saisir la façon dont
l'histoire enseignée à l'école aujourd'hui en France fait une place aux
transformations sociétales qui engagent l'avenir collectif. C'est le cas
notamment des flux migratoires post-coloniaux, qui ont renouvelé la
population de la France. Combien sont les élèves issus de ces flux ? Leur
taux moyen est mal connu, mais il est à coup sûr significatif et peut
être localement très élevé. De plus, ces flux ont modifié l'imaginaire
collectif du Nous, ils ont introduit un sentiment de pluralité culturelle
inédite donnant naissance à des représentations ethno-raciales de la
diversité interne de la société, et ce en décrochage marqué par rapport
au principe d'invisibilité des appartenances non-politiques cher à la
philosophie républicaine. Du coup ils instillent de l'inquiétude et du
« problème » dans l'appréhension de l'avenir commun. Comment l'histoire
enseignée prend-elle en compte ces transformations, comment amène-t-elle
les élèves, tous les élèves, à faire sens de leur expérience de la
pluralité sociale et spécialement du racisme, dont tous sont conscients à
des titres divers[2] ? Comment les prépare-t-elle à leur destin commun ?
Antoine Prost disait en 1984, lors du Colloque national sur l'histoire et
son enseignement réuni par Alain Savary : « D'une certaine manière,
l'histoire nous permet de cohabiter, de vivre ensemble et de former une
collectivité. Son importance pour la nation vient des divisions mêmes de
celle-ci » (Prost, 1984, p. 136). Cette réflexion prend tout son sens
dans le contexte des flux migratoires post-coloniaux. Jacques Le Goff,
alors président de la commission consultative sur l'enseignement de
l'histoire, est encore plus explicite dans les conclusions du même
colloque : « L'histoire de Lavisse et de Mallet-Isaac était celle d'une
nation rassemblée autour de la conscience de son unité affirmée vaille
que vaille, de la valeur universelle de son modèle. L'histoire de la
France aujourd'hui doit assumer ses divisions du passé et du présent et,
sans les gommer, montrer que cela n'empêche pas les Français de vouloir
vivre ensemble » (Le Goff, 1984, p. 166). L'objet de cette contribution est de faire un point sur l'évolution des
réponses apportées à ce titre par l'enseignement de l'histoire. Les
programmes d'histoire du second degré (collège et lycée général et
technologique) ont été examinés sur une trentaine d'années. Ils seront
mis en perspective avec les manuels. Les programmes et manuels d'histoire
en école primaire, d'instruction civique (au collège) et d'ECJS (au
lycée) n'ont pas été pris en compte, ce qui constitue une limite de
l'investigation.
Islam et colonisation dans les programmes d'histoire du secondaire depuis
les années 1970 Deux objets concentrent les risques de divisions intestines associés au
passé de la France, risques imputés aux immigrés post-coloniaux :
l'islam, et la séquence colonisation/décolonisation. L'islam fut pendant
toute la période coloniale moderne la principale contre-identification
collective française (Lorcerie, 2007)[3] . Il partagea ce statut sous la
Troisième République avec l'Allemagne, mais on le sait la construction
européenne amorcée aux lendemains de la deuxième guerre mondiale
transforma l'ennemi allemand en principal partenaire. Quant à la
colonisation, c'est dans son cadre que l'image du danger musulman et de
l'altérité irréductible de l'Islam prit forme en France à l'époque
moderne, dans le rapport de forces entretenu pour le besoin de
l'entreprise coloniale. La décolonisation amena une recomposition de
cette image d'altérité radicale, mais certainement pas sa purgation. Nous
centrerons donc la recherche sur ces thèmes. Comment les programmes s'y
prennent-ils pour introduire les élèves à la question de l'islam et à
celle de la colonisation-décolonisation ? Quatre phases peuvent être
reconstruites dans le traitement de ces thèmes par les programmes
d'histoire. 1. Dans les années 1960-1970, prévalence du référentiel traditionnel de
l'histoire scolaire On trouve d'abord une phase, dans les années 1960-1970, dans laquelle les
thèmes de l'islam et de la colonisation-décolonisation sont à peu près
absents des programmes.[4] L'histoire enseignée est alors chronologique
et politique. Elle répond à quatre principes qui structurent ce que l'on
peut nommer le référentiel traditionnel de l'enseignement de l'histoire
en France : « Ce sont : le principe d'universalité : rien de ce qui
appartient à l'histoire des hommes n'est en dehors du domaine de
l'histoire comme discipline. Le principe d'objectivité : il s'agit
d'accéder au vrai de l'histoire; l'étude repose sur la critique des
sources et l'analyse des documents. Le principe d'utilité différée : à
l'opposé des connaissances directement instrumentales, l'histoire comme
discipline scolaire entend donner des outils pour penser et participer
librement au progrès humain [une fois l'élève devenu citoyen]. Le
principe de priorité nationale : il règle la sélection et la pondération
des matières niveau par niveau. »[5] Il règle aussi, discrètement,
l'orientation morale d'ensemble. A cette époque, le principe
d'universalité étant filtré par le principe de priorité nationale,
l'entreprise coloniale est esquivée. « L'espace de référence a varié » -
la France ne va plus de Dunkerque à Tamanrasset - et l'on évite « les
sujets qui mettraient en cause soit des groupes, soit l'Etat républicain,
qui demeure le signe de la continuité de la communauté nationale ». La
France demeure « la patrie imaginaire des droits de l'homme », pour
reprendre les propos conclusifs de Françoise Lantheaume dans la thèse
qu'elle a consacrée à l'étude de l'enseignement de l'histoire de la
colonisation en Algérie à travers les manuels de lycée (Lantheaume, 2002,
p. 431-432). 2. De la deuxième moitié des années 1970 à la fin des années 1980 :
déstabilisation du référentiel traditionnel, premières insertions sur
l'islam et la colonisation-décolonisation La deuxième phase commence avec le ministère Haby (1974-1978). Celui-ci
veut introduire au premier cycle de l'enseignement secondaire un