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Puis, à bout d'observations sur la faune locale, il regagna ses pénates. ...... où, il
faut bien le dire, Son Excellence, l'Honorable Henry Gladstone Kiku, M.A. ..... La
loi, c'est ce que tu persuades le tribunal de prendre pour tel. ...... de ces séries d'
examens qui pourrait durer des années, ou remet en doute le statut de la bête?

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LE PORTRAIT DE DORIAN GRAY (TRADUIT DE L'ANGLAIS) Deuxième Édition ALBERT SAVINE, ÉDITEUR PARIS 12, RUE DES PYRAMIDE 1893 PRÉFACE Un artiste est un créateur de belles choses. Révéler l'Art en cachant l'artiste, tel est le but de l'Art. Le critique est celui qui peut traduire dans une autre manière ou avec de
nouveaux procédés l'impression que lui laissèrent de belles choses. L'autobiographie est à la fois la plus haute et la plus basse des formes de
la critique. Ceux qui trouvent de laides intentions en de belles choses sont corrompus
sans être séduisants. Et c'est une faute. Ceux qui trouvent de belles intentions dans les belles choses sont les
cultivés. Il reste à ceux-ci l'espérance. Ce sont les élus pour qui les belles choses signifient simplement la
Beauté. Un livre n'est point moral ou immoral. Il est bien ou mal écrit.
C'est tout. Le dédain du XIXe siècle pour le réalisme est tout pareil à la rage de
Caliban apercevant sa face dans un miroir. Le dédain du XIXe siècle pour le Romantisme est semblable à la rage de
Caliban n'apercevant pas sa face dans un miroir. La vie morale de l'homme forme une part du sujet de l'artiste, mais la
moralité de l'art consiste dans l'usage parfait d'un moyen imparfait. L'artiste ne désire prouver quoi que ce soit. Même les choses vraies
peuvent être prouvées. L'artiste n'a point de sympathies éthiques. Une sympathie morale dans un
artiste amène un maniérisme impardonnable du style. L'artiste n'est jamais pris au dépourvu. Il peut exprimer toute chose. Pour l'artiste, la pensée et le langage sont les instruments d'un art. Le vice et la vertu en sont les matériaux. Au point de vue de la forme, le
type de tous les arts est la musique. Au point de vue de la sensation,
c'est le métier de comédien. Tout art est à la fois surface et symbole. Ceux qui cherchent sous la surface le font à leurs risques et périls. Ceux-là aussi qui tentent de pénétrer le symbole. C'est le spectateur, et non la vie, que l'Art reflète réellement. Les diversités d'opinion sur une oeuvre d'art montrent que cette oeuvre est
nouvelle, complexe et viable. Alors que les critiques diffèrent, l'artiste est en accord avec lui-même. Nous pouvons pardonner à un homme d'avoir fait une chose utile aussi
longtemps qu'il ne l'admire pas. La seule excuse d'avoir fait une chose
inutile est de l'admirer intensément. L'Art est tout à fait inutile. OSCAR WILDE.
LE PORTRAIT DE DORIAN GRAY
1 I L'atelier était plein de l'odeur puissante des roses, et quand une légère
brise d'été souffla parmi les arbres du jardin, il vint par la porte
ouverte, la senteur lourde des lilas et le parfum plus subtil des
églantiers. D'un coin du divan fait de sacs persans sur lequel il était étendu, fumant,
selon sa coutume, d'innombrables cigarettes, lord Henry Wotton pouvait tout
juste apercevoir le rayonnement des douces fleurs couleur de miel d'un
arbour, dont les tremblantes branches semblaient à peine pouvoir supporter
le poids d'une aussi flamboyante splendeur; et de temps à autre, les ombres
fantastiques des oiseaux fuyants passaient sur les longs rideaux de tussor
tendus devant la large fenêtre, produisant une sorte d'effet japonais
momentané, le faisant penser à ces peintres de Tokio à la figure de jade
pallide, qui, par le moyen d'un art nécessairement immobile, tentent
d'exprimer le sens de la vitesse et du mouvement. Le murmure monotone des
abeilles cherchant leur chemin dans les longues herbes non fauchées ou
voltigeant autour des poudreuses baies dorées d'un chèvrefeuille isolé,
faisait plus oppressant encore ce grand calme. Le sourd grondement de
Londres semblait comme la note bourdonnante d'un orgue éloigné. Au milieu de la chambre sur un chevalet droit, s'érigeait le portrait
grandeur naturelle d'un jeune homme d'une extraordinaire beauté, et en
face, était assis, un peu plus loin, le peintre lui-même, Basil Hallward,
dont la disparition soudaine quelques années auparavant, avait causé un
grand émoi public et donné naissance à tant de conjectures. Comme le peintre regardait la gracieuse et charmante figure que son art
avait si subtilement reproduite, un sourire de plaisir passa sur sa face et
parut s'y attarder. Mais il tressaillit soudain, et fermant les yeux, mit
les doigts sur ses paupières comme s'il eût voulu emprisonner dans son
cerveau quelque étrange rêve dont il eût craint de se réveiller. -Ceci est votre meilleure oeuvre, Basil, la meilleure chose que vous ayez
jamais faite, dit lord Henry languissamment. Il faut l'envoyer l'année
prochaine à l'exposition Grosvenor. L'Académie est trop grande et trop
vulgaire. Chaque fois que j'y suis allé, il y avait la tant de monde qu'il
m'a été impossible de voir les tableaux, ce qui était épouvantable, ou tant
de tableaux que je n'ai pu y voir le monde, ce qui était encore plus
horrible. Grosvenor est encore le seul endroit convenable.... -Je ne crois pas que j'enverrai ceci quelque part, répondit le peintre en
rejetant la tête de cette singulière façon qui faisait se moquer de lui ses
amis d'Oxford. Non, je n'enverrai ceci nulle part. Lord Henry leva les yeux, le regardant avec étonnement à travers les minces
spirales de fumée bleue qui s'entrelaçaient fantaisistement au bout de sa
cigarette opiacée. -Vous n'enverrez cela nulle part? Et pourquoi mon cher ami? Quelle raison
donnez-vous? Quels singuliers bonshommes vous êtes, vous autres peintres?
Vous remuez le monde pour acquérir de la réputation; aussitôt que vous
l'avez, vous semblez vouloir vous en débarrasser. C'est ridicule de votre
part, car s'il n'y a qu'une chose au monde pire que la renommée, c'est de
n'en pas avoir. Un portrait comme celui-ci vous mettrait au-dessus de tous
les jeunes gens de l'Angleterre, et rendrait les vieux jaloux, si les vieux
pouvaient encore ressentir quelque émotion. -Je sais que vous rirez de moi, répliqua-t-il, mais je ne puis réellement
l'exposer. J'ai mis trop de moi-même là-dedans. Lord Henry s'étendit sur le divan en riant.... -Je savais que vous ririez, mais c'est tout à fait la même chose. -Trop de vous-même!... Sur ma parole, Basil, je ne vous savais pas si vain;
je ne vois vraiment pas de ressemblance entre vous, avec votre rude et
forte figure, votre chevelure noire comme du charbon et ce jeune Adonis qui
a l'air fait d'ivoire et de feuilles de roses. Car, mon cher, c'est
Narcisse lui-même, tandis que vous!... Il est évident que votre face
respire l'intelligence et le reste.... Mais la beauté, la réelle beauté
finit où commence l'expression intellectuelle. L'intellectualité est en
elle-même un mode d'exagération, et détruit l'harmonie de n'importe quelle
face. Au moment où l'on s'asseoit pour penser, on devient tout nez, ou tout
front, ou quelque chose d'horrible. Voyez les hommes ayant réussi dans une
profession savante, combien ils sont parfaitement hideux! Excepté,
naturellement, dans l'Église. Mais dans l'Église, ils ne pensent point. Un
évèque dit à l'âge de quatre-vingts ans ce qu'on lui apprit à dire à dix-
huit et la conséquence naturelle en est qu'il a toujours l'air charmant.
Votre mystérieux jeune ami dont vous ne m'avez jamais dit le nom, mais dont
le portrait me fascine réellement, n'a jamais pensé. Je suis sûr de cela.
C'est une admirable créature sans cervelle qui pourrait toujours ici nous
remplacer en hiver les fleurs absentes, et nous rafraîchir l'intelligence
en été. Ne vous flattez pas, Basil: vous ne lui ressemblez pas le moins du
monde. -Vous ne me comprenez point, Harry, répondit l'artiste. Je sais bien que je
ne lui ressemble pas; je le sais parfaitement bien. Je serais même fâché de
lui ressembler. Vous levez les épaules?... Je vous dis la vérité. Une
fatalité pèse sur les distinctions physiques et intellectuelles, cette
sorte de fatalité qui suit à la piste à travers l'histoire les faux pas des
rois. Il vaut mieux ne pas être différent de ses contemporains. Les laids
et les sots sont les mieux partagés sous ce rapport dans ce monde. Ils
peuvent s'asseoir à leur aise et bâiller au spectacle. S'ils ne savent rien
de la victoire, la connaissance de la défaite leur est épargnée. Ils vivent
comme nous voudrions vivre, sans être troublés, indifférents et
tranquilles. Il n'importunent personne, ni ne sont importunés. Mais vous,
avec votre rang et votre fortune, Harry, moi, avec mon cerveau tel qu'il
est, mon art aussi imparfait qu'il puisse être, Dorian Gray avec sa beauté,
nous souffrirons tous pour ce que les dieux nous ont donné, nous
souffrirons terriblement.... -Dorian Gray? Est-ce son nom, demanda lord Henry, en allant vers Basil
Hallward. -Oui, c'est son nom. Je n'avais pas l'intention de vous le dire. -Et pourquoi? -Oh! je ne puis vous l'expliquer. Quand j'aime quelqu'un intensément, je ne
dis son nom à personne. C'est presque une trahison. J'ai appris à aimer le
secret. Il me semble que c'est la seule chose qui puisse nous faire la vie
moderne mystérieuse ou merveilleuse. La plus commune des choses nous paraît
exquise si quelqu'un nous la cache. Quand je quitte cette ville, je ne dis
à personne où je vais: en le faisant, je perdrais tout mon plaisir. C'est
une mauvaise habitude, je l'avoue, mais en quelque sorte, elle apporte dans
la vie une part de romanesque.... Je suis sûr que vous devez me croire fou
à m'entendre parler ainsi?... -Pas du tout, répondit lord Henry, pas du tout, mon cher Basil. Vous
semblez oublier que je suis marié et que le seul charme du mariage est
qu'il fait une vie de déception absolument nécessaire aux deux parties. Je
ne sais jamais où est ma femme, et ma femme ne sait jamais ce que je fais.
Quand nous nous rencontrons-et nous nous rencontrons de temps à autre,
quand nous dinons ensemble dehors, ou que nous allons chez le due-nous nous
contons les plus absurdes histoires de l'air le plus sérieux du monde. Dans
cet ordre d'idées, ma femme m'est supérieure. Elle n'est jamais embarrassée
pour les dates, et je le suis toujours; quand elle s'en rend compte, elle
ne me fait p