Le travail enseignant face à la réforme des séries STI (sciences et ...

des actions menées sur la période écoulée et de mettre ..... un sujet d'actualité
incontournable pour les entreprises. ... ?il neuf, ce collège se réunit pour corriger
..... BTS Bâtiment, DUT Génie civil, BTS TP, BTS/DUT Génie thermique et ...

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Yves Baunay
Chantier travail
Le travail enseignant face à la réforme des séries STI (sciences et
techniques industrielles)
La réforme des séries STI s'applique depuis la rentrée 2010 aux
enseignements de Seconde.
Les enseignants n'ont pas été consultés. Des critiques fortes ont été
formulées, notamment par le SNES. Beaucoup pensent que c'est l'existence
même de la voie technologique avec ses spécificités qui est en cause. Mais
au final, c'est la réforme qui dicte aux enseignants ce qu'ils doivent
faire, ce qu'on attend d'eux (le travail prescrit). L'Institut de recherches de la FSU et son chantier travail ont entrepris
une recherche sur le thème :
« Qu'est-ce que la réforme des STI au niveau de la classe de Seconde change
dans le travail réel des enseignants des disciplines technologiques ? » Il s'agit de rechercher comment les enseignants dans leur activité
concrète, quotidienne, font face à la nouvelle situation de travail créée
par la nouvelle organisation des enseignements de STI. : un « enseignement
d'exploration SI (sciences de l'ingénieur) de 1 H ½ remplace l'option ISI
(initiation aux sciences de l'ingénieur). Un « enseignement d'exploration »
CIT (conception et innovation technologique) de 1H et demi, remplace une
série d'options de 3 H dont ISP (informatique et système de production). La
réforme se poursuivra en première à la rentrée 2011 et en terminale à la
rentrée 2012. Une douzaine de baccalauréats de sciences et techniques
industrielles allant des matériaux souples à la mécanique, en passant par
l'électronique, l'électrotechnique, l'optique... vont être remplacés par un
nouveau baccalauréat « généraliste » STI 2D. Comment s'y prennent les
enseignants en charge de ces enseignements d'exploration en STI ? Qu'est-ce
que ça change dans leur plaisir ou leurs difficultés ? Qu'est-ce que ça
leur coûte éventuellement en termes de satisfaction dans leur travail ? En
termes de santé peut-être aussi ? Comment s'y prennent-ils pour faire
malgré tout un travail de qualité ? Quelles marges de liberté se donnent-
ils et comment les utilisent-ils ? Quels dilemmes, quels conflits internes
de valeurs ou de critères sont-ils amenés à trancher dans la réalisation
quotidienne de leur activité d'enseignants ? Pour mener cette recherche, ont été réalisées des interviews approfondies
auprès d'enseignants de Seconde confrontés à une situation de travail qui
est en rupture avec leur expérience précédente, marquée par d'autres
réformes, mais qui n'avaient pas un impact aussi profond sur leur travail. Cette recherche est co-produite par les enseignants volontaires et des
chercheurs de l'Institut. Enseignants interviewés :
- Un professeur certifié de génie mécanique enseignant les SI dans une
seconde d'un lycée de Marseille.
- Un professeur agrégé de génie mécanique, option construction (B1)
enseignant la CIT dans une seconde d'un autre lycée de Marseille.
- Deux enseignants certifiés de génie mécanique et un de mécanique, d'un
lycée de La Ciotat enseignant en 2nde SI et CIT.
- Une professeure certifiée de physique appliquée enseignant les SEL
(sciences et laboratoires), un professeur certifié de génie mécanique
option construction enseignant les SI (sciences de l'ingénieur), un
professeur agrégé de génie électrique (option électrotechnique)
enseignant les SI dans un autre lycée de Marseille.
Participait aussi aux interviews un professeur de BTS Génie Civil.
Une réforme déstabilisatrice pour le travail enseignant « C'est un coup qu'on a pris sur la tête »
« On a mis en place dans l'urgence des enseignements nouveaux... On a
débarrassé les machines, vidé les laboratoires... C'est irréversible. Je ne
suis pas convaincu quant au sens de la réforme... »
« Une réforme précipitée », « on nous prend pour des moins que rien ».
C'est un autre travail qui est prescrit aux professeurs et qui donne une
impression de table rase. « Ce que j'ai fait depuis 15 ans en
seconde...c'est bon pour la poubelle » « Il faut tout recommencer à zéro »,
« je me sens en situation d'incompétence, pas agréable à vivre ». Le sens
de la réforme n'est pas évident.
L'examen des arrêtés officiels indique que les nouveaux programmes ont été
conçus par coupé/collé à partir des anciens. Et pourtant, ce qui est
demandé, « la démarche d'exploration », les horaires divisés par deux, le
remplacement des supports matériels (objets techniques et systèmes
techniques) par des ordinateurs et des logiciels...n'a plus rien à voir
avec ce qui était enseigné auparavant. « Quand les inspecteurs nous disent
qu'on n'est plus sensé donner des connaissances aux élèves, ça fait un
choc »
En fait, c'est la finalité même de l'enseignement qui change : « il faut
que les élèves réfléchissent sans directives précises », « on ne donne plus
les bases ». « Le geste technique, l'objet technique, doivent être bannis »
alors qu'ils étaient au fondement de la pédagogie dans les enseignements
technologiques. « Mais nous ne savons pas enseigner autrement qu'avec les
gestes techniques, les savoir-faire... »
« Quand on imagine quelque chose (comme le font les ingénieurs) après il
faut fabriquer... donc le geste technique est nécessaire ».
Malgré tout « j'essaie d'avoir une position positive... » « j'ai choisi
avec les élèves les domaines qui les intéressaient... »
Construire du sens avec une réforme dont les finalités sont obscures
« Le gros problème, c'est que je ne comprends pas où ils veulent aller ».
Quand aux inspecteurs « ou bien ils ne comprennent pas eux-mêmes, ou bien
ils ne veulent rien dire ». « Ils sont dans la même merde que nous. » « je
n'ai pas l'impression qu'on va former des gens capables de travailler sur
des outils modernisés et en évolution. »
Le lien avec l'évolution de l'industrie n'est pas du tout perceptible. « On
perd un savoir-faire, un outil de travail qui était perfectible... »
« J'utilise des libertés qui nous sont données pour que mon enseignement
serve à quelque chose. »
On perçoit bien que le ministère est prêt à faire des économies, par contre
ni la finalité pédagogique, ni la finalité économique à long terme ne sont
perceptibles.
Précarité subjective
Comment reconstruire un travail solide et durable ?
La logique gestionnaire qui a présidé à la réforme peut encore sévir. Les
deux options SI et CIT sont tellement voisines qu'elles pourraient bien
fusionner, entraînant de nouvelles pertes horaires, de nouvelles
suppressions de postes. La possibilité de continuer à travailler en groupes
est soumise à l'arbitraire des chefs d'établissements. On garde l'espoir
que l'administration fera le bilan de ce que les élèves auront acquis,
qu'elle en tirera les conséquences en portant les horaires à deux heures au
moins ; et enfin qu'elle redonnera « du sérieux à cette seconde technique
pour qu'on puisse attirer les élèves motivés vers le technique ». Et puis,
toutes ces suppressions de postes, qui vont s'accélérer avec la montée en
charge aux niveaux 1ère et Terminale...fragilisant les situations
individuelles.
« Je me sens sur un siège éjectable ». « Comment dans ces conditions
s'investir à long terme dans cet enseignement, en cherchant à l'améliorer
progressivement. Au final ne cherche-t-on pas quelque part à supprimer nos
enseignements technologiques ». Tout inspire la défiance et la méfiance sur
les finalités réelles et sur l'avenir. Un véritable plan social de
reconversion des professeurs en surnombre est en train de se mettre en
place. Et face à ces menaces bien tangibles, chacun se sent isolé face à
l'administration.
Il faut dispenser un enseignement pour lequel on ne se sent pas compétent.
Il a fallu faire un travail de recherche durant l'été qui a précédé la
rentrée, en visitant les sites académiques. « J'ai le sentiment de faire un
travail de répétiteur de cours en ligne que je sélectionne selon mes
critères et sur lesquels j'appose le logo du lycée ». « Je répète ces cours
sans les maîtriser ». Des cours modèles figurent sur le site du rectorat qui ont été réalisés par
des collègues désignés par l'Inspection. « Un travail de galérien ». On a
fourni à ces collègues du matériel, des supports, des systèmes qui coûtent
cher. A ceux qui doivent faire les mêmes cours, on leur refuse les mêmes
moyens. Le lycée n'a pas les ressources pour les financer. Transformer les situations locales, élargir les marges de liberté,
travailler en collectif, ça devient déterminant pour faire malgré tout du
bon travail La mise en ?uvre de la réforme a suscité une grande variété d'initiatives
locales pour créer un rapport de force et améliorer les situations:
horaires de SI et CIT portés à deux heures (par ajout d'une demi-heure
d'accompagnement personnalisé) ; un matériel commandé tôt et disponible à
la rentrée ; liberté d'organisation acquise par les équipes ; temps de
concertation pris en libérant les élèves ; travaux en classes dédoublées ;
contenu de SI intégré dans l'option MPS (méthodes et pratiques
scientifiques) ; liberté d'interprétation des programmes ; partenariat avec
une association financée par le conseil général... « J'essaie malgré tout
d'avoir une attitude positive... Si non, ça serait le martyre » « On a décidé d'appliquer la réforme tout en prenant une grande liberté
pour construire collectivement les contenus et la démarche pédagogique ».
« On s'entend bien », « on travaille collectivement », « le travail
d'équipe, c'est déterminant », « on se passe ce qu'on fait », « on discute,
même si on n'est pas toujours d'accord »... Tout cela change sensiblement le vécu, le plaisir ressenti, le sens même du
travail. « On a un bon fonctionnement d'équipe. Chacun a développé une thématique.
On mutualise. « On échange les préparations... Si non, on n'aurait fait que
cela... » Parfois ce travail collectif est rendu impossible. Et c'est difficile à
vivre quand on ne