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Le lieu médical, quel que soit son niveau, dispensaire, centre de santé, hôpital, ...
sur l'aspect médical : plaintes, interrogatoire, examen, diagnostic, traitement. ... l'
organisation de l'espace temps avant la consultation conditionne l'efficacité et ...

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Accueil du malade
par Olivier Bismuth* et jean Van Elslande* * Médecin-généraliste. Le lieu médical, quel que soit son niveau, dispensaire, centre de santé,
hôpital, est un point de rencontre entre le malade et son soignant. Il est
généralement perçu comme un endroit où l'on vient consulter et se soigner.
La majeure partie des enseignements aux soignants porte sur l'aspect
médical : plaintes, interrogatoire, examen, diagnostic, traitement. Or ce
lieu médical peut être autre chose : dépistage, séances d'éducation ou de
vaccinations. Il est un autre aspect, beaucoup moins évoqué, mais toujours présent, c'est
l'accueil. Habituellement, cela est considéré sous l'angle de la
gentillesse et des qualités humaines du soignant, évidemment essentielles.
Cependant, l'organisation de l'espace temps avant la consultation
conditionne l'efficacité et la bonne réputation du lieu et des soins
pratiqués. Par espace-temps, nous voulons dire tout ce qui se passe avant,
et pendant la consultation. Nous vous invitons à réfléchir sur vos propres
qualités d'accueil et leurs conditions matérielles. I. Les qualités humaines Certaines vont de soi :
- politesse,
- ponctualité,
- amabilité,
- tenue et attitude correctes,
- le fait que le consultant se sente reconnu, si ce n'est pas la première
fois qu'il vient. Il ne doit pas se sentir un étranger, un importun. Une
petite phrase de reconnaissance l'aidera à se sentir à l'aise et à
attendre. De même, lui dire à la fin de la consultation qu'il revienne, si
cela ne va pas mieux ; ou le reconduire vers la sortie, influera
positivement sur l'accueil ressenti. Nous voulons insister sur d'autres vertus : - l'écoute : laissons le patient exposer toutes ses plaintes sans
l'interrompre, afin qu'il se sente écouté. Ne craignons pas qu'il soit
trop bavard et " mangeur de temps ". En général, si on le laisse parler
sans lui poser de questions d'éclaircissement, il va achever son
discours... De plus, cette impression d'avoir été écouté sera majorée si, à
la fin de l'interrogatoire, l'essentiel des plaintes est résumée de façon
concise ; - la discrétion : que le patient ait confiance qu'il ait la certitude qu'il
ne sera pas répété à d'autres qu'il est atteint d'une blennorragie ou du
sida. Nous reviendrons plus loin sur le secret médical avec l'aménagement
du lieu de travail. Il. Conditions matérielles d'un bon accueil - L'apparence du centre de santé à l'arrivée. Souvent, le patient
appréhende de consulter et hésite à venir. Il émanera quelque chose de
sympathique et attrayant d'un dispensaire où on aura planté des haies, des
parterres de fleurs et dont les murs auront été repeints, crépis ou
chaulés. - La propreté et l'hygiène des lieux interviennent dans le même sens. Cela
implique que soient installés un ou deux bidons recouverts. Ils serviront
de poubelles et seront placés ni trop près, ni trop loin, du lieu de
consultation, afin d'éviter les nuisances (odeurs, mouches). Le contenu
doit être régulièrement vidé et détruit. (Ici comme ailleurs, faudra-t-il
parvenir à un tri sélectif une poubelle pour les déchets périssables une
pour les pansements, etc.) Le balayage des couloirs, allées et locaux sera
un souci permanent. La question sera de définir qui en sera chargé et à
quel moment. - Le confort des attendants sera périodiquement réévalué. Existe-t-il
suffisamment de bancs, un préau pour se mettre à l'abri des intempéries,
pluie et soleil ? - La discrétion est-elle assurée ? Certainement pas, lorsque les enfants
peuvent tout
voir par la fenêtre du bureau de consultation ; ou quand la file d'attente
stationne à la porte ou dans le bureau même et que tout le monde entend
tout. Un espace entre le bureau et les attendants s'impose donc, et de
préférence occupé par quelque chose comme une haie isolante. De plus, un
paravent de déshabillage permettant de respecter la pudeur des malades est
souhaitable. - Les perturbations sonores. La situation est bien connue. Le matin,
entre huit heures et midi, une foule de gens qui attendent, discutent et
s'énervent à cause de resquilleurs, pendant que des enfants pleurent et
crient. Vouloir réduire ce bruit revient à organiser la file d'attente.
Quelles mesures expérimenter ? 1. Tout simplement, faire appel au civisme des gens, leur proposer de
s'éloigner pour discuter. 2. Créer un espace libre entre la salle de consultation et la zone
d'attente, et si possible occupée par un haie isolante comme nous le
disions plus haut. 3. Alléger la file d'attente en donnant des rendez-vous à certains
malades ; par exemple, des malades dont on peut prévoir une consultation
longue (prise de connaissance d'une femme souffrant de douleurs chroniques
du bas ventre ou d'un diabétique). Il vaut mieux que cela se passe un
après midi, dans le calme. Il en est de même pour des notables du
village, cherchant des passe-droits avant ceux qui attendent depuis les
premières heures. Le rendez-vous l'après-midi leur donnera l'impression
d'être valorisé, satisfera les « petites gens » et n'embarrassera pas le
soignant. - Donner à l'arrivée un numéro d'attente. Par expérience, nous savons que
cette mesure est impopulaire. Mais si elle se généralise dans les
administrations du monde entier, les gares, les banques, etc., il n'y a
pas de raison que ne soit pas possible pour une formation sanitaire. Cela
évitera les disputes, les bousculades, les regards de défiance envers les
réputés resquilleurs. Et même à la limite, pourquoi la ménagère ne
pourrait-elle pas aller faire ses courses au marché en attendant que son
tour arrive. Nous faisons une mise en garde cependant: donner des numéros
aux patients peut masquer de vrais urgences. Il conviendra d'être
vigilant. - Le tri des arrivants. Le problème est difficile. Il est normal que des
malades graves en évacuation sanitaire passent avant d'autres. Pour
d'autres, ils se sentent si mal qu'ils réclament d'être vus de suite. La
difficulté réside dans l'écart entre l'urgence ressentie par le malade,
comme pour la grande fatigue d'une crise de paludisme et celle évaluée par
le thérapeute selon ses critères médicaux (urgence différée par rapport à
l'urgence immédiate). En outre, qui va évaluer cette urgence ? Le
manoeuvre chargé de l'accueil ; l'infirmier en consultation ? Sur quels
critères ? Tout cela nécessite une réunion de discussion, puis de
formation entre toute l'équipe du dispensaire, avec le médecin
coordinateur-superviseur, pour déterminer qui fera le tri, à quel moment
et comment. - La gestion du temps d'attente. Il serait utile que ce temps mort soit
mis à profit. 1. Tout d'abord le manoeuvre chargé de l'accueil, s'il sait écrire,
pourrait fournir et vendre le carnet à ceux qui n'en ont pas ; ou demander
celui de ceux qui en ont un déjà. Le carnet de santé, en tant que support
d'information est un outil indispensable s'il est bien rempli et consulté.
L'accueillant aura à noter la date de consultation et la plainte. 2. Ensuite, il pourrait prendre la température, mais est-ce bien utile ?
De plus, les thermomètres sont coûteux, se cassent facilement (d'où
pollution terrestre par le mercure) et il existe un risque théorique de
contamination par le virus de l'hépatite B. 3. En revanche, la pesée systématique des enfants malades s'avère bien
plus rentable. En effet, le dépistage des malnutritions protéino-
caloriques est primordial. La pesée des enfants malades permet de dépister
les enfants malnutris qui ne vont pas à la consultation de PMI, ce d'autant
si le trouble nutritionnel est débutant. Elle est indispensable dans la
surveillance de la diarrhée. 4. Autre façon d'occuper le temps d'attente: si les effectifs en
personnel le permettent, quelqu'un de l'équipe pourrait animer une petite
causerie éducative (hygiène de l'eau, accidents de la voie publique ou
domestiques, etc.) pendant un quart d'heure en retrait du dispensaire.
Cela aussi implique une réunion d'organisation de tous avec le médecin
coordinateur. - La circulation des patients. L'idéal serait que les malades et leurs
accompagnants se déplacent d'un poste au suivant, en séquence linéaire,
sans que ne se produisent des embouteillages. En théorie, cela serait : «
entrée > accueil > consultation > pansements > piqûres > médicaments >
sortie », sans que le patient fasse des va-et-vient ou stationne trop
longtemps au poste de soins ou à la pharmacie. Cela dépend du nombre
d'agents sanitaires dans le centre ; et là aussi, une réunion
d'organisation et de définition des tâches de chacun s'impose. III. Conclusion L'accueil des malades n'est pas que politesse ou gentillesse, mais en
grande partie, écouter et organiser l'attente, le confort de ceux qui
patientent et la discrétion des consultations. Un accueil agréable fera
beaucoup pour la qualité et la réputation du centre médical. Certes,
toutes les propositions précédentes ne sont pas des recommandations, mais
nous souhaitons que cet article sensibilise à la notion d'accueil et
surtout vous invite à réfléchir à votre propre accueil dans votre lieu de
travail.
[pic]
Développement et Santé, n° 145, février 2000