Suggestions au candidat à l'examen

Ils et elles sont rares à suivre ces conseils de base pour réussir un examen ...
Pourtant, passer - et réussir - des épreuves d'examen ou de concours relève
autant de la forme physique et ... Un propos solide et argumenté, illustré et
cohérent.

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Suggestions au candidat à l'examen Richard Descoings (in Challenges, 27 mai 2010) Concentrés mais reposés. Maîtrisant solidement les connaissances
nécessaires mais l'esprit à distance du bachotage. Telle pourrait être la
définition d'une candidate ou d'un candidat relevant de l'idéal. Ils et
elles sont rares à suivre ces conseils de base pour réussir un examen - par
exemple le bac - ou un concours d'entrée dans une école. Pourtant, passer -
et réussir - des épreuves d'examen ou de concours relève autant de la forme
physique et psychologique que de l'accumulation de connaissances, surtout
si elles sont de dernière minute. Arriver épuisé faute d'avoir suffisamment
dormi, se retrouver face au sujet tellement stressé qu'on en devient inhibé
ou qu'on panique conduit à prendre des risques graves d'échec. Comme un
sportif, un candidat doit donc veiller à préserver son temps de sommeil -
il ne sert à rien de « réviser » jusqu'à pas d'heure les deux ou trois
nuits qui précèdent le moment fatidique. Comme un sportif, un candidat doit
avoir conservé la disponibilité d'esprit pour se montrer flexible, agile,
adaptable face aux sujets. Au-delà de ces évidences, voici quelques
conseils pour faire au mieux face aux épreuves. Rien n'est plus insupportable pour un correcteur que de constater à la
lecture d'une copie que son auteur n'a pas pris le quart d'heure nécessaire
en début d'épreuve pour « baliser » les différentes pistes qu'ouvre la
question posée. Baliser un sujet consiste en la même opération que baliser
un terrain pour permettre à un avion d'atterrir sans craindre la sortie de
piste - le hors sujet. Il s'agit d'éclairer les différentes facettes de la
question, ou, si le sujet n'est pas posé sous forme de question, de montrer
ce que sont les questions sous-jacentes à l'énoncé. De proposer un cadre à
la réflexion pour que la pensée déploie sa complexité en harmonie :
déterminer un cap, prévoir le temps des transitions, comme le plongeur
prend le temps de marquer des étapes dans sa remontée vers la surface.
Guider le lecteur de la copie, en somme, pour suivre le raisonnement tenu,
apprécier la solidité de l'argumentation, la pertinence des illustrations. Un deuxième gage de succès est d'inscrire sa pensée dans le temps et
l'espace. Bien peu de candidats songent à donner de l'épaisseur historique
à leur propos. Ils ne sont pourtant pas les premiers à s'emparer de la
question posée ! Et moins encore imaginent qu'il peut être intéressant de
donner une dimension comparatiste à leur vision : pense-t-on de la même
manière à Shanghai ou Sao Paulo ? L'histoire est le laboratoire du présent,
aimait à dire René Rémond. L'espace est ce qui permet d'échapper à
l'étroitesse de l'esprit de clocher. Un troisième gage de réussite est l'originalité : les correcteurs peuvent
avoir des dizaines, parfois des centaines de copies à corriger sur le même
sujet. Voir revenir les mêmes références, rarement approfondies, les mêmes
citations, rarement assorties au sujet de façon appropriée, parfois les
mêmes lieux communs, peut devenir, à la longue, assez insupportable. Une
copie pleine de curiosité intellectuelle, aiguisée par un point de vue bien
défendu, se démarquant du flot majoritaire, sera perçue d'un oeil revigoré,
et donc bienveillant, par le correcteur. Le sens du discernement, celui du
jugement, compte autant pour obtenir la meilleure note possible que le
déversement de connaissances qu'on « jette » sur la copie pour se rassurer
soi-même. Prenons un exemple. A l'entrée de Sciences-Po, il y a quelques
années, la réflexion proposée aux candidats était : « Qu'est-ce qu'un
esprit juste ? » Il fut assez facile d'écarter la moitié au moins des
copies de la « moyenne ». Celles dont les auteurs avaient « foncé » sans
réfléchir plus avant sur le présupposé que le mot « juste » renvoyait
exclusivement à l'idée de justice. Oubliant qu'un esprit juste est
également, et peut-être avant tout, un esprit soucieux de justesse, c'est-à-
dire épris d'exactitude, de précision, de raison. Le Petit Robert, qui
devrait être l'un des livres de chevet de tout candidat, cite opportunément
Vauvenargues : « Ce n'est pas un grand avantage d'avoir l'esprit vif, si on
ne l'a juste. » Un mot, enfin, des épreuves orales. Structurellement, le candidat est en
position d'infériorité face à un jury. Dans cette circonstance par nature
désagréable, deux attitudes intellectuelles me paraissent appropriées :
l'humilité et la solidité. L'humilité, c'est écouter les questions - il n'y
a rien de pire qu'un candidat qui, croyant bien faire et avoir compris très
vite, interrompt le jury pendant qu'il pose une question. L'humilité, c'est
prendre dix à trente secondes pour réfléchir, y compris en prévenant le
jury. L'humilité de dire « je ne sais pas », mais de construire un
raisonnement à haute voix, qui montre que l'on n'est pas désarçonné et que
l'on accepte d'entrer dans le jeu de la conversation. Et puis, la solidité
: y aller « à l'esbroufe », cela se voit tout de suite. Et ça ne marche
pas. Un propos solide et argumenté, illustré et cohérent. Tout cela fait
beaucoup de qualités à réunir ; ce sont celles qui font réussir.