Avant propos - Groupe Européen de Recherches en Langues Créoles

Elles sont beaucoup plus ciblées, réunissant uniquement une partie des
enseignants. Par exemple, celle en piano a permis de décider des dates d'
examen de ...

Part of the document


Textes anciens en créole français de la Caraïbe (Histoire et analyse)
Marie-Christine Hazaël-Massieux
Sommaire Introduction I - Les textes principaux selon diverses versions : présentations et
analyse
Chapitre Ier : Les créoles selon les auteurs et scripteurs du temps Chapitre IIe : La Passion selon St Jean et son contexte au XVIIIe siècle Chapitre IIIe : De Lisette quitté la plaine aux Idylles et chansons :
l'histoire des chansons créoles, les variantes et le contexte historique Chapitre IVe : Jeannot et Thérèse (les deux versions du XVIIIe siècle,
complétées par Fondoc et Thérèse de Paul Baudot) Chapitre Ve : Les proclamations révolutionnaires Chapitre VIe : De Ducoeurjoly à la parabole de l'Enfant prodigue : Les
développements du créole haïtien au début du XIXe siècle Chapitre VIIe : L'abbé Goux : catéchisme et grammaire créoles Chapitre VIIIe : Marbot et les autres : les fables dans la Caraïbe Chapitre IXe : Conflits politiques et polémiques au XIXe siècle : l'affaire
Bissette / Schoelcher Chapitre Xe : La littérature en Guadeloupe et en Martinique à la fin du
XIXe siècle et au début XXe siècle Chapitre XIe : Haïti : G. Sylvain, O. Durand, J. L'Hérisson et les avancées
dans le XXe siècle
II - Quelques grandes questions grammaticales
Chapitre XIIe : Les descriptions des grammairiens du XIXe siècle Chapitre XIIIe : Un schéma évolutif. La créolisation et le développement
des langues Chapitre XIVe : La détermination dans la Caraïbe Chapitre XVe : Les pronoms Chapitre XVIe : Le système verbal Chapitre XVIIe : Genre et nombre Chapitre XVIIIe : Mots de coordination et de subordination
III - Les langues issues des « créoles » : les évolutions abouties en
Martinique, Guadeloupe, Haïti... Nouvelles évolutions. Séparations plus importantes. A-t-on encore affaire à
des « créoles » ? (les structurations / séparations du XXe siècle) Définition d'un créole Situation au début du XXIe siècle : le rôle de l'écriture. Introduction
Objet de ce livre L'histoire de la colonisation, même s'il reste des zones d'ombres, est
maintenant bien connue. Récemment, l'ouvrage d'Olivier Pétré-Grenouilleau,
2004[1] a suscité discussions et polémiques. De fait, la colonisation et
l'esclavage restent souvent des sujets tabous, car à côté de l'histoire
véritable fondée sur des textes et des documents, une pseudo-histoire s'est
plus ou moins construite par tradition, proche de la légende, et qu'il
n'est guère possible de toucher à ce qui correspond à des convictions
profondes, aussi importantes parfois qu'un mythe d'origine. Pourtant, la
consultation directe des journaux de plantation, des documents régissant
l'esclavage obligent à porter des regards nouveaux sur une période qui
certes a été marquée par des faits que nos mentalités modernes ne peuvent
que dénoncer, mais pour la compréhension de laquelle le regard de
l'historien est toujours nécessaire. L'étude de la vie pendant la
colonisation, l'analyse des rapports sociaux et économiques, bien au-delà
des dénonciations - par ailleurs légitimes, mais qui se situent à un autre
niveau d'intervention - impliquent l'accès à tous les documents. Pour nous
linguistes, il s'agit de saisir et de décrire, le plus objectivement
possible, les interactions, les contacts qui permettent d'élaborer des
hypothèses quant à la genèse des créoles dans ce contexte historique
complexe, si possible d'établir la part des différentes langues en présence
dans ces situations de plurilinguisme, et d'envisager toutes les questions
linguistiques et sociolinguistiques qui en découlent.
Notons toutefois dès maintenant que le linguiste est obligé à la prudence
quand il s'agit d'estimer la place exacte tenue par une ou des langues dans
l'évolution linguistique en raison de ce premier fait, régulièrement
vérifié : la présence d'une population en un lieu n'implique pas la survie
obligatoire de sa langue, ou même la survie de traits provenant de celle-
ci, et nombreux sont les cas historiquement connus où en raison de
conditions sociolinguistiques défavorables, une langue a pu l'emporter
complètement sur une autre, même si la population qui parlait la langue
devenue dominante était moins nombreuse. La domination linguistique est
liée à des facteurs divers (suprématie sociale, économique, culturelle) qui
peuvent l'emporter complètement et l'importance numérique d'une population
peut, dans certains cas, être un facteur relativement secondaire. Ainsi,
certaines populations s'adaptent beaucoup mieux que d'autres à une langue
nouvelle, notamment dans des conditions où l'apprentissage de celle-ci est
un facteur d'intégration, quand la population d'apprenants est plus jeune,
quand il n'y a pas d'autres moyens pour elle pour communiquer, quand
l'apprentissage de la langue nouvelle pour cette population est occasion de
promotion sociale, etc. De fait, les esclaves se sont retrouvés assez
rapidement plus nombreux que les maîtres pendant la colonisation, mais on
sait que l'on ne peut absolument pas conclure pour autant à une influence
majeure de leurs langues, du fait précisément du nombre des langues qu'ils
pratiquaient, pas toujours intercompréhensibles, mais aussi du fait de la
domination du maître[2] : il a été nécessaire très vite aux esclaves de
comprendre du français, d'utiliser ces rudiments acquis. Les chroniqueurs
nous parlent par exemple de français corrompu, et il n'est pas facile de
savoir si ce français était corrompu volontairement par les maîtres
(recourant à une espèce de « petit-nègre », à un jargon, pour se faire
comprendre des esclaves), ou par les esclaves eux-mêmes en situation
d'apprentissage. C'est sans doute de ces essais de communication
approximatifs que sont nés les langues dites « créoles », à l'instar de
leurs locuteurs, les populations créoles, terme qui renvoie aux populations
nées aux îles de parents qui au départ n'en étaient pas originaires[3] :
les noirs-créoles (ou nègres créoles, comme on dit parfois à cette
époque[4]) ou les blancs-créoles (expression qui continue à être en usage
en Guadeloupe pour désigner les blancs « locaux » par opposition aux blancs
venus de Métropole). Des textes en créole nous sont parvenus de ces époques de la colonisation,
d'autres ont été écrits polus tard après l'abolition de l'esclavage, dans
la seconde moitié du XIXe siècle, d'autres enfin tout au long du XXe
siècle. : tous ces textes permettent très réellement d'établir une histoire
des langues dites « créoles » dans la Caraïbe, mais plus encore d'envisager
des hypothèses quant au développement de langues nouvelles (on parle
parfois de « langues émergentes ») dans des situations de contacts. Certes ces textes, écrits, suscitent à l'occasion des réserves ; ceux qui
n'ont pas eu l'occasion de les étudier doutent parfois de leur
authenticité ; mais examinés avec les précautions nécessaires que nous
rappellerons ci-dessous, ces textes se révèlent vite du plus grand intérêt
pour suivre les évolutions linguistique et finalement l'élaboration de ces
langues que sont maintenant l'haïtien, le guadeloupéen, le martiniquais, le
sainte-lucien, le dominicain, le guyanais, etc. D'autres linguistes en
d'autres zones, en ont déjà reconnu l'intérêt puisque dans cette même
collection Robert Chaudenson a dès 1981 publié des Textes créoles anciens
(La Réunion et Ile Maurice). Comparaison et essai d'analyse, puis en 1987,
Ingrid Neumann-Holzschuh des Textes anciens en créole louisianais. Il manquait de fait une étude des textes de la Caraïbe, particulièrement
significative, nous semble-t-il, car elle permet de voir comment les formes
grammaticales se fixent, se dispersent et s'opposent selon les zones. Dans
cet ouvrage, nous viserons principalement à présenter les textes[5], à
établir les règles de leurs fonctionnements grammaticaux. Quand, à
l'occasion, des données étymologiques pourront être établies, nous
n'hésiterons pas à les exposer, mais ce n'est pas la visée de cet ouvrage :
notre compétence, très insuffisante dans les diverses langues africaines
parlées par les esclaves ne permettait de toutes façons pas de prétendre à
l'exhaustivité en la matière, mais en outre, il faut dire que la grande
masse du matériau est indéniablement française à l'origine et ainsi on peut
reconstituer des étymologies avec de bons dictionnaires. Enfin, un
dictionnaire étymologique des créoles de la Caraïbe est en cours (sous la
direction d'Annegret Bollée, après la réalisation du Dictionnaire
étymologique des créoles de l'Océan Indien), et ce travail étymologique
sera donc assuré dans les années qui viennent. Notre visée ici est donc
principalement d'étudier les développements du/des langues créoles au cours
des siècles passées et d'essayer de dégager les règles présidant à
l'établissement progressif de grammaires différenciées et structurées. On se méfiera des rapprochements trop rapides ou « négatifs »[6] qui
amèneraient à considérer que la grammaire (morphologie et/ou syntaxe) des
créoles vient des « langues africaines », chaque fois que l'évolution
prévisible, en quelque sorte automatiquement à partir du français, souvent
régional et toujours oral, des XVIIe et XVIIIIe siècles ne permet pas de
parvenir au créole. Précisément, en situation de contacts de langues, les
évolutions sont très complexes et sans doute faut-il imaginer d'autres
règles pour expliquer les développeemnts