La causalité dans les sciences sociales - Ined
Après ma tentative d'autolyse de février 2009, poussé par une volonté de ......
toutes tes superbes expériences, tes superbes rencontres, ta grande philosophie
de la ..... Déception le jour des résultats du bac où tu pensais avoir une mention,
mais où ..... Courageusement tu passes divers examens : ponction lombaire, IRM
, ...
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La causalité dans les sciences de la population : retour sur le principe de
l'action humaine
Herbert L. Smith Population Studies Center
Université de Pennsylvanie
Philadelphie, Pennsylvanie 19104-6298 É-U hsmith@pop.upenn.edu
Version du 26 avril 2011 ; une version très légèrement remaniée de celle
disponible sur place au séminaire des Lundis de l'INED du 28 mars 2011.
Commentaires et corrections bienvenus. Merci d'avance... et de votre
intérêt !
La causalité dans les sciences de la population : retour sur le principe de
l'action humaine
Résumé Dans la littérature anglo-saxonne, l'idée du critère (ou principe) de
« manipulation » dans l'étude des liens de causalité est débattue. Cette
idée ? Que la différence entre deux états d'être ne peut pas constituer un
« effet d'une cause » en soi sauf quand les tels états (ou conditions) sont
sujets à la manipulation dans le sens d'une expérience, où
l'expérimentateur peut assigner aléatoirement (de manière réelle ou
virtuelle) les sujets à ces conditions. C'est un peu un casse-tête, car
conceptuellement l'expérience est fortement présente dans la définition
(contemporaine, moderne, statistique, anglo-saxonne) de « l'effet d'une
cause » mais parmi les scientifiques en sciences sociales (surtout
démographes), on a tendance à tenter d'identifier les causes dans des faits
plus ou moins immuables, comme le sexe ou l'âge. Effectivement, la liste
des « causes » potentielles dans la littérature est longue, mais la liste
des facteurs, surtout au niveau individuel (où nous collectons la plupart
de nos données) ne l'est pas. Dans ce contexte, le critère de manipulation
est un invité imprévu, voire malvenu. Que faire ? Bien sûr, on peut
étendre la définition d'une cause afin qu'elle convienne à nos habitudes,
et il y a toujours beaucoup à dire pour le pluralisme et la tolérance, en
science comme ailleurs. Mais si on se pose la question, « ce langage de
causalité, pourquoi nous intéresse-t-il tant ? » on revient sur l'idée que,
au fond, on s'efforce de découvrir ce qui va se passer si nous faisons
quelque chose, quand nous agissons. De là, trois constatations et/ou
implications : - Que c'est par la capacité d'action plus que par celle de manipulation
expérimentale que « les vraies causes » s'annoncent, et qu'en tout cas,
les choses immuables ne devraient probablement pas être considérées en
tant que « causes » ; - Que dans le monde social, la plupart des actions se déroulent à un niveau
plus élevé que celui de l'individu (et, par conséquent, que nous nous
trompons avec la plupart de nos « analyses causales ») ; - Que l'établissement des « effets d'une cause », l'obsession actuelle de
la littérature sociale scientifique américaine, n'occupe qu'un espace
exceptionnellement limité du terrain fécond des démographes.
La causalité dans les sciences de la population : retour sur le principe de
l'action humaine En 2005 un tremblement de terre d'une magnitude de 7,9 a frappé le
nord du Chili. Heureusement, ce grand séisme a assommé peu de gens.
Pourtant, un nombre assez important ont été secoués, dont des femmes
enceintes. Au vu de Torche (2011), le tremblement de terre était
également « une expérience naturelle », lui permettant d'évaluer l'effet
sur le poids de naissance de l'exposition au stress aigu. Sous l'hypothèse
qu'un séisme ne cible pas les gens sauf par hasard, elle démontre que dans
les zones qui ont subi les secousses maximales, les enfants des femmes
enceintes du premier semestre touchées par le séisme pesaient à leur
naissance en moyenne 51 grammes de moins que les enfants des femmes
situées dans les zones non-affectées - un effet dû, pour la plupart, à un
raccourcissement de la durée de gestation. De ces faits, elle insiste sur
le rôle éventuel du stress maternel prénatal dans les inégalités sociales
de santé. Aux États-Unis, les listes des électeurs inscrits sont consultables
par le grand public, y compris si un tel électeur a effectivement voté dans
un scrutin spécifique. En 2004 une équipe de politologues a obtenu un
grand fichier d'électeurs pour l'état d'Illinois - plus de 7 millions de
noms au sein de 2,7 millions de ménages ! - dont leurs adresses et numéros
de téléphone, des caractéristiques démographiques (sexe, âge), et leurs
histoires de participation électorale (Arceneaux, Gerber et Green 2010).
Ils en ont tiré un échantillon aléatoire de 16 000 électeurs éventuels (pas
plus d'une personne par foyer) et ont tenté de les joindre par téléphone
pour les encourager à voter dans une élection qui était en train d'arriver.
Seulement 41% des gens sélectionnés étaient joignables, et la question se
pose : Les gens les plus joignables (et, du coup, peut-être, les plus
abordables), sont-ils aussi les plus aptes à répondre - c'est-à-dire, à
voter - à la suite d'un tel coup de fil et le message apporté ? Arceneaux
et al (2010, p. 260) s'intéressent à « l'effet causal d'un coup de
téléphone sur ceux qui sont joignables »[1]. Ils comprennent bien qu'un
groupe témoin - même soigneusement sélectionné parmi les électeurs
éventuels non appelés et appariés exactement (par rapport à l'histoire de
la participation électorale, le sexe, et l'âge) à ceux qui ont été joints,
donc encouragés - va mêler les « gentilles » personnes qui répondent quand
le téléphone sonne à celles qui se méfient de ce genre d'appel, qui sont
rarement chez elles, qui n'ont pas précisé un numéro de téléphone, etc.
Par conséquent, pour évaluer l'effet d'un tel coup de téléphone parmi les
personnes l'ayant bien reçu, Arceneaux et al. (2010) effectuent une analyse
par la méthode de moindres carrés à deux étapes, où la sélection (ou non)
originale (et aléatoire) pour se faire contacter sert en tant que variable
instrumentale dans la régression de vote (oui ou non) sur contact réalisé
(oui ou non). Il s'avère que : (a) la probabilité d'aller voter augmente
de 2% avec la réception d'un tel message ; et, tout à fait, (b) les gens
qui ont tendance à répondre aux coups de téléphone sont aussi les types qui
ont tendance à voter, tout court. Autre étude en 2004, dans la ville de New York, les entreprises et
les commerçants qui cherchaient à recruter des employés pour des emplois ne
nécessitant pas plus du niveau bac et peu d'expérience ont affiché des
annonces de recrutement, comme d'habitude, dans les journaux et sur des
sites internet. Les gens postulent pour ces emplois et les employeurs
potentiels leur répondent ou ne leur répondent pas, les convoquent pour un
entretien ou pas, leur proposent un emploi ou pas - tout à la manière
désordonnée du marché du travail américain. Sauf que, de temps en temps,
et d'une façon aléatoire, un employeur potentiel a reçu, dans un intervalle
de 24 heures, trois candidats avec les qualifications essentiellement
identiques, un « blanc », un autre « noir », et un troisième hispanique
(portoricain). Leur ordre de candidature a varié entre les employeurs,
bien sûr non informés de cet artifice. Quant aux « testeurs » - ces
jeunes hommes qui ont effectué ses candidatures, qui se sont présentés aux
entretiens - ils avaient été au préalable embauchés et formés par une
sociologue qui cherchait à connaitre l'effet de la « race » (ou l'ethnicité
ou la couleur de la peau) sur les chances d'une réponse positive (soit être
convoqué pour un entretien, soit se faire proposer un emploi). Il s'avère
qu'il n'y avait pas une différence significative entre les chances d'un
« blanc » et celles d'un hispanique, mais qu'il y avait une différence
significative pour celles d'un « noir » par rapport aux deux autres.
Différence au combien significative ? Il y avait aussi un autre ensemble
de testeurs dans lequel le candidat « blanc » venait de purger une peine de
prison de 18 mois (possession de cocaïne) tandis que les deux autres
candidats similaires (à l'exception de leur race ou ethnicité) présentaient
des casiers vierges. Ce n'était que dans ce cas que les chances du
« blanc » se sont rapprochées de celles du noir ! Pour résumer, une peau
noire égalait en moyenne à 18 mois en prison (avec preuve de
consommation de drogues), au moins dans les yeux de ces employeurs
potentiels (Pager, Western et Bonikowski 2009). Ces trois exemples sont des recherches d'un haut niveau scientifique,
toutes parues, avec justice, dans les grandes revues. On en apprend
beaucoup : . Que le stress lié à un choc soudain comme celui d'un tremblement de
terre très violent chez les femmes enceintes a un rôle important sur
la santé de leurs enfants, particulièrement pour celles enceintes
seulement de quelques mois ; . Que les tentatives d'augmenter la participation électorale par le
biais des coups de téléphone se heurtent en premier lieu au fait que
ceux qui ont tendance à s'absenter des urnes sont également ceux qui
sont peu enclins à décrocher le combiné ; et, surtout, . Que la discrimination ressentie dans le marché de travail par les
africains-américains n'est pas du tout anecdotique : Elle est
systématique, et elle est très forte. Ces trois recherches s'appuient sur le cadre d'analyse qui s'efforce
d'établir l'effet d'une cause, où un tel effet est défini en principe (et
assez librement, pour le moment) en fonction de la différence dans la
réponse d'une unité sous deux états d'être différents. De cette manière,
Torche (2011) veux savoir la différence entre le poids de naissance d'un
enfant issu d'une mère qui a été très stressée par un tremblement de terre
et celui de l'enfant de cette mère dans le cas où elle n'aurait pas subi un
tel choc. Arceneaux et al. (2010) cherchent à établir la probabilité qu'un
électeur potentiel, qui reçoit un