2. le concept de grandeur - Hal
Il s'agit ici d'identifier les problèmes de didactique liés à la notion de grandeur et
à ... pour l'enseignement, sans un examen critique adéquat dans le champ de la
..... un groupement à un seul objet, cas particulier du dénombrement par groupes
. .... Ordre et classification, Algèbre combinatoire, 1 et 2, Librairie Hachette Paris.
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Guy Brousseau
Les grandeurs dans la scolarité obligatoire[1] ABSTRACT : The concept of magnitude used to be a fundamental concept of mathematics
teaching it is now hardly studied hidden under various structures.
The survey of the numerous types of magnitude is only approached in
the teaching of other disciplines. His text presents a didactical
genesis of all kinds of magnitudes, based on situations proper to
explicit definition and meaning. It is meant to be used
effectively by mathematics teachers a primary and lower secondary
levels of education
INTRODUCTION ET METHODOLOGIE
1.1. UN PROBLEME DE MACRO-DIDACTIQUE Il s'agit ici d'identifier les problèmes de didactique liés à la notion de
grandeur et à l'apprentissage des " grandeurs " dans la scolarité
obligatoire. Mon intérêt pour ce sujet n'est pas récent. J'ai l'impression
d'assister, impuissant, à des dégradations drastiques des conditions de son
enseignement sous l'effet de forces incoercibles et ignorées par mes
contemporains. Peut-être ces craintes ne sont-elles, que l'effet de l'âge,
qui rend moins optimiste, mais je relève beaucoup de dysfonctionnements
nouveaux. Il me semble d'autre part qu'il ne sert à rien de jouer les
Cassandre : dans le meilleur des cas, identifier des phénomènes et leur
trouver des explications donne toujours l'impression qu'avec quelques
décisions empiriques opportunes on pourra les contrôler. Je crois donc
qu'il vaut mieux travailler à donner en même temps les analyses
scientifiques et les moyens théoriques et techniques de produire des
solutions appropriées.
Il existe nombre d'études sur différents aspects de l'enseignement des
grandeurs, mais ces études portent presque toujours seulement sur quelques
aspects particuliers de la question.
C'est le cas de toutes celles qui ont pour objet la proposition de
situations, l'observation des réactions des élèves à ces situations, celle
de leurs apprentissages, la description de leçons réalisées dans des
classes, etc. J'ai songé un instant à évoquer ici la liste des situations
que j'avais personnellement conçues ou observées dans ce domaine. Je n'y ai
renoncé que pour l'instant car réunir les travaux de micro-ingénierie[2]
didactique que nous connaissons dans ce domaine pourrait être bien utile.
Les autres études consistent essentiellement en un travail relevant d'une
ou de plusieurs disciplines telles que les mathématiques, l'épistémologie,
l'histoire des mathématiques, la psychologie, la sociologie ou la pédagogie
etc. et de ces travaux déclarés " préalables " - et le plus souvent fort
respectables au demeurant -, suivi d'inférences directes et de conclusions
dans le domaine de la didactique, sans véritables études spécifiques ni
justifications scientifiques.
Il s'en trouve d'ailleurs fort peu qui portent sur l'enseignement de sujets
mathématiques aussi complexes que les grandeurs et leur mesure.
Je ne récuse nullement l'usage d'informations importées d'autres
disciplines, bien au contraire, et je trouve parfaitement légitime
d'établir celles dont nous avons besoin dans les disciplines qui peuvent le
mieux les fournir, mais je récuse a priori toute inférence directe tirée de
ces informations, pour l'enseignement, sans un examen critique adéquat
dans le champ de la didactique proprement dite. Cette attitude m'a
toujours condamné à essayer de présenter des alternatives, et me voici donc
aujourd'hui confronté à ce défi d'esquisser ce que seraient les études
macrodidactiques1 du concept de grandeur. Ce projet peut sembler une
gageure, car le concept de Grandeur est si intimement lié depuis si
longtemps aux progrès de l'humanité en général et à celui des mathématiques
en particulier, il apparaît sous des formes si variées, dans un si grand
nombre de circonstances différentes, dans les pratiques de sociétés si
diverses, il intervient dans l'enseignement sur une période si longue, il
est lié à tant d'autres sujets mathématiques qu'il est très hasardeux de
postuler a priori la validité didactique de la simple juxtaposition des
approches indépendantes classiques[3] . C'est du moins ce que je chercherai
à établir par l'observation de quelques phénomènes.
Mais ces caractéristiques montrent bien qu'éclaircir les conditions
théoriques et pratiques de l'enseignement des grandeurs et de leurs mesures
est typiquement une question de macro-didactique dans tous les sens du
terme.
C'est en effet un concept
i) qui est très utilisé, bien qu'avec des sens assez différents, par de
nombreuses institutions importantes et différentes,
ii) qui est très ancien et qui a donc laissé dans la culture des traces des
diverses étapes de son développement, iii) qui a fait l'objet " récemment" d'évolutions profondes dans les
institutions scientifiques ce qui a accru les divergences " transpositives
" didactiques[4] ,
iv) qui est étroitement lié à de nombreuses connaissances mathématiques
fondamentales,
v) de sorte qu'il s'apprend dans des processus naturels et scolaires
précoces et très prolongés.
A l'énoncé de ces caractères, il est déjà clair que chacun apporte son lot
de difficultés et d'incompatibilités avec ce qu'apportent les autres et par
conséquent réagit sur eux. On peut en inférer que la macrodidactique ne
pourra pas être un simple agrégat d'études sur des agrégats de constituants
de la relation didactique. Il s'agira ici pour moi d'esquisser les types de recherches que l'on peut
attendre des didacticiens des mathématiques dans ce domaine. J'ai
probablement présumé de mes forces, mais il me fallait saisir l'occasion
pour la dernière fois peut être - d'affronter ce problème. Ce que je ne
pourrai pas montrer, je le suggèrerai et d'autres peut être le
prolongeront. 1.2. CADRE METHODOLOGIQUE
1.2.1. APPROCHE CLASSIQUE A cause des conditions iv) et v), l'approche mathématique soutenue par des
pédagogies et des didactiques " classiques " s'est longtemps imposée à
l'enseignement. Dans le dernier tiers du XXième siècle l'approche
psychogénétique a appuyé certaines réformes voulues par les mathématiciens
au titre de iii) et a la fois a fourni l'essentiel des recherches et a pesé
son poids sur l'enseignement.
L'ouvrage de Nicolas Rouche " le sens de la mesure ", a fait le point, il
y a une dizaine d'années sur les approches de ce type. La bibliographie de
cet ouvrage fait ressortir que très peu d'études prennent les grandeurs
directement comme objet. La plupart ne s'y intéressent essentiellement que
comme une voie vers les nombres et vers la mesure. Et elles le font
essentiellement en restant dans le domaine " des objets mentaux " et des
concepts mathématiques.
Rouche choisit de prolonger les travaux de Freudenthal et de partir des "
phénomènes ". Cette méthode est à première vue déjà débarrassée des
impedimenta et des incohérences de la pratique et de certaines réalités et
s'écarte des limitations excessives des modèles axiomatiques. Un phénomène
est " toute relation souvent familière entre des ensembles, des formes, des
grandeurs ou des nombres et qui se présente à l'esprit comme matériau et
point d'appui de la pensée mathématique à ses débuts ". Malgré cela,
Freudenthal (1983) se trouve encore devant un tel dédale qu'il s'exclame "
j'espère au moins que je ne me noierai pas dans cet océan ". Nicolas Rouche
connaît ces difficultés, il est intéressant de noter les raisons pour
lesquelles il persiste : Ce livre a pour objet d'exposer bon nombre de phénomènes qui impliquent
des grandeurs et des nombres (irrationnels non compris !) Mais, nous
l'avons déjà dit, l'ensemble de ces phénomènes est extrêmement touffu,
ce qui rend difficile de les exposer clairement. Pour éviter que le
lecteur ne se perde, il fallait trouver un fil conducteur. Or ce fil ne
pouvait être celui du développement réel de ces notions dans l'esprit
des enfants, et ce pour plusieurs raisons. La première est que
plusieurs des phénomènes en question peuvent demeurer (éventuellement
sans dommage) définitivement absents de l'esprit de certains enfants.
La seconde est que, sur bien des points, chaque enfant progresse à sa
façon et qu'il faudrait d'abord dégager une improbable façon moyenne ou
typique. La troisième enfin est que la progression d'un enfant particulier que
l'on prendrait pour témoin n'est pas suffisamment explicite (il se
passe beaucoup plus de choses dans l'esprit que ce que l'observation
peut déceler).
Le fil conducteur ne pouvait pas être non plus celui de la genèse
historique, car des phénomènes aussi élémentaires et fondamentaux que
l'addition des grandeurs, l'ordre, les fractionnements simples, etc.
remontent plutôt à la préhistoire, aux balbutiements de l'homo sapiens,
perdu dans la nuit des temps... Hanz Freudenthal a tenté de dresser le
vaste inventaire commenté des phénomènes qui conduisent non seulement
aux grandeurs, aux nombres rationnels aux proportions mais quasiment à
l'ensemble des mathématiques élémentaires. (Rouche 1992, 21)
1.2.3. APPROCHE ANTHROPOLOGIQUE Aujourd'hui, l'approche anthropologique - en particulier praxéologique -
paraît a priori mieux adaptée pour décrire de façon ouverte la diversité
des situations réelles créées par i), ii) et iii) dans diverses
institutions, surtout s'il ne s'agit que de comprendre les difficultés.
Il est en effet indispensable pour le didacticien de pouvoir distinguer les
différents se