2. Des difficultés de validation des formations aux IAS ... - Hal-SHS

Au-delà de la nécessaire harmonisation du cursus des examens d'expertise ....
Ces normes, et plus particulièrement la deuxième, ont évidemment constitué une
source ..... financière et l'évaluation financière des groupes en normes IAS/IFRS.

Part of the document


Comment enseigner les IAS / IFRS ? Alain BURLAUD
Professeur titulaire de chaire du Conservatoire national des arts et
métiers
Directeur de l'Institut national des techniques économiques et comptables
(INTEC)
Depuis une vingtaine d'années, un enseignement très spécialisé sur les IAS
et plus généralement sur la normalisation comptable internationale, proche
de la recherche, est assuré dans les anciens DESS et DEA[1]. Les nombreuses
communications aux congrès ou journées pédagogiques de l'Association
francophone de comptabilité[2] en témoignent. Quelques thèses ont également
été soutenues sur ce sujet ainsi que des mémoires d'expertise comptable. En
revanche, l'introduction de cette formation dans un enseignement de masse
se heurte à d'importantes difficultés.
Des difficultés pédagogiques.
S'adressant à un public de jeunes bacheliers, il est difficile de faire
comprendre que la comptabilité enregistre avec précision les opérations (un
ticket de caisse de supermarché est une pièce comptable qui fait apparaître
les centimes) alors que certains postes du bilan peuvent être évalués avec
un écart de plusieurs millions d'euros selon le référentiel retenu.
L'exemple suivant est assez éloquent : |Bénéfice (+) ou perte (-) consolidé|Normes nationales |IAS |
| | | |
|en millions d'USD | | |
|Daimler Benz (Allemagne) 1993 |+ 300 |- 600 |
|Hoechst (Allemagne) 1995 |+ 850 |- 30 |
|France Télécom 1996 |+ 350 |- 5 650 |
La comptabilité a une image de vérité absolue et indiscutable alors qu'il
s'agit en réalité d'une construction purement conventionnelle, variable
dans le temps et dans l'espace, variable selon la nature et les objectifs
de l'entité concernée[3]. Cette découverte ne doit pas conduire, dans
l'esprit du public, à la conclusion que convention égal manipulation. La seconde difficulté tient au fait que les mêmes mots recouvrent des
choses différentes quand on change de référentiel. Par exemple, le mot
« actif » renvoie à la notion de patrimoine dans le PCG, c'est-à-dire à une
notion concrète issue du droit, vécue quotidiennement, alors que le
référentiel IAS définit un actif comme « une ressource contrôlée par
l'entreprise du fait d'évènements passés et dont les avantages économiques
futurs sont attendus par l'entreprise... » Le niveau d'abstraction des
concepts des IAS est tel que le message est difficile à faire passer ! La troisième difficulté tient au fait que nous soyons obligés d'enseigner
simultanément deux référentiels différents en dépit des efforts de
convergence. Les réponses aux questions suivantes ne sont pas encore
suffisamment stabilisées pour qu'émergent des « principes pédagogiques
généralement admis ».
- Faut-il aborder successivement les règles comptables selon le PCG puis
les IAS ?
- Faut-il traiter des IAS selon une démarche hypothético-déductive en
partant du cadre conceptuel pour arriver, par le raisonnement, à la
solution pour telle ou telle opération ou faut-il étudier les IAS norme
par norme ?
- Faut-il aborder la comptabilité opération par opération et pour chacune
présenter la solution du PCG, celle des IAS et, enfin, le cas échéant, la
position fiscale ?
- Faut-il enseigner la comptabilité en partant de la liste des postes des
comptes annuels (des états financiers) ?
A l'heure actuelle, les enseignements sont largement dissociés comme le
montre la bibliographie ci-dessous puisque les ouvrages de comptabilité
approfondie ne traitent que très marginalement des IAS et que les IAS font
l'objet d'ouvrages spécialisés. Mais cela résulte aussi largement des
programmes officiels.
2. Des difficultés de validation des formations aux IAS / IFRS.
Au regard de la validation des connaissances acquises, il y a plusieurs
catégories de formations :
- le cursus des études comptables conduisant à l'expertise ;
- les autres formations comptables supérieures ;
- les formations spécifiques aux IAS / IFRS ;
- l'information sur les IAS / IFRS. Le cursus des études comptables actuel (DPECF, DECF et DESCF) ignore à peu
près totalement les IAS. Les programmes ont été plusieurs fois actualisés
mais le dernier arrêté date du 4 août 1997. La réforme actuellement en
cours[4] devrait aboutir fin 2005 ou début 2006 et intégrera pleinement les
IAS / IFRS. Toutefois, un programme est rédigé pour une durée de validité
de l'ordre d'une dizaine d'années. Compte tenu des inconnues sur
l'évolution des référentiels comptables sur une telle période, tant en
France avec les travaux du CNC sur la convergence, qu'au niveau de l'IASB
avec le travail permanent de normalisation et les réflexions sur un
référentiel spécifique pour les PME, il n'est pas possible d'être très
précis. Le projet de programme[5] fait donc une présentation et non une
simple liste des problèmes qui devront être abordés sans préciser le
référentiel, ce qui signifie que l'ensemble des règles applicables en
France devront être étudiées comme c'est le cas pour toutes les autres
branches du droit[6]. Les autres formations comptables supérieures telles les DESS, DEA ou
certaines options d'écoles de commerce, ne sont pas contraintes par un
programme national. Elles introduisent pratiquement toujours au moins une
introduction aux IAS / IFRS mais aussi parfois aux US GAAP. Sauf exception,
l'objectif n'est donc pas de former des professionnels ayant une compétence
opérationnelle en matière d'IAS / IFRS. Face à ce vide, un certain nombre d'institutions ont organisé des
formations certifiantes[7] dédiées à la question. C'est le cas de la
profession comptable française, Ordre et Compagnie, avec la création de
trois formations :
- « Visa pour les IFRS » qui s'adresse essentiellement à des confrères et
les forme en 150 heures ;
- « Pratique des IFRS » en 40 heures et
- « Normes IFRS : les fondamentaux » en deux jours.
L'INTEC a créé dès 2002 un certificat de spécialisation « Normes comptables
internationales » préparé soit en enseignement à distance seul, soit avec
des compléments de cours en présentiel. Plus de 1000 personnes se sont déjà
inscrites à cette formation. Dans tous les cas, un examen final contrôle le
niveau acquis et, dans le cas favorable, le valide par la délivrance du
certificat. Enfin, un grand nombre d'organismes de formation privés ou des cabinets ont
organisé des séminaires d'information d'une à plusieurs journées,
généralement à destination des professionnels, sur les IAS / IFRS mais sans
autre sanction qu'une attestation de présence.
Conclusion.
Le droit comptable international est, de par sa nature même, autonome par
rapport au droit fiscal et au droit des affaires qui relèvent aujourd'hui
de la souveraineté de chaque pays. Or, depuis une vingtaine d'années, on
voit ce droit comptable sans frontières prendre petit à petit le pas sur
les droits comptables nationaux. Il ne se limite d'ailleurs pas aux seules
normes de comptabilité financière mais inclut également les normes d'audit,
d'éthique et de comptabilité publique. Il y aura donc une besoin de
formations lourdes, difficiles mais valorisantes pour pouvoir satisfaire
aux exigences du public dans un domaine dont la complexité est croissante.
Bibliographie
COLASSE Bernard : Comptabilité générale. Economica, 2005, 518 p.
LANGLOIS Georges, FRIEDERICH Micheline et BURLAUD Alain : Comptabilité
approfondie. Foucher, 2005, 592 p.
MAILLET Catherine et LE MANH Anne : Les normes comptables internationales
IAS / IFRS. Foucher, 2005, 192 p.
OBERT Robert : Comptabilité approfondie et révision. Dunod, 2002, 488 p.
OBERT Robert : Pratique des normes IAS / IFRS. Dunod, 2004, 541 p. -----------------------
[1] DESS = diplôme d'études supérieures spécialisées (finalité
professionnelle) ; DEA = diplôme d'études approfondies (finalité
recherche). Il s'agit de diplômes nationaux de troisième cycle délivrés par
les universités. Ils sont remplacés aujourd'hui par les masters
professionnels et les masters recherche dans le cadre de la réforme LMD
(licence, master, doctorat) qui harmonise l'organisation des études
supérieures dans les pays membres de l'Union européenne.
[2] L'AFC regroupe quasiment tous les enseignants-chercheurs en
comptabilité, contrôle de gestion, audit et finance d'entreprise. Elle
compte 450 membres.
[3] Les comptes sociaux sont différents des comptes consolidés, ceux de
l'Etat ou d'une collective territoriale sont différents de ceux d'une
entreprise, etc.
[4] Cette réforme devrait conduire au remplacement des DPECF, DECF et DESCF
par le Diplôme de comptabilité et de gestion (DEG) à bac + 3 et le Diplôme
supérieur de comptabilité et de gestion (DSCG) à bac + 5. Elle intégrera le
cursus comptable dans le LMD.
[5] Ce projet, disponible sur le site du Conseil supérieur de l'Ordre, est
le fruit du travail du Groupe de travail sur la réforme des examens
comptables de l'Etat (GRECE).
[6] Nous avons la conviction qu'il y aura une autonomie croissante du droit
comptable.
[7] La délivrance d'un diplôme national n'est ici guère possible car elle
obéit à des règles lourdes. La formule la plus souple est le diplôme
d'établissement (non habilité par le ministère de l'éducation nationale) ou
le certificat.